En quête de tableaux du XVIIe siècle ! Siglo de oro, Seicento… Sur le stand élégant de la galerie Sarti, je découvre un beau Ribera figurant le roi David. Comme sur l’autoportrait de Léonard conservé à Turin, on admire ici un vieil homme dont on devine qu’il fut beau. Ce sont, au-dessus d’un manteau ocre et d’un grand col d’hermine, une barbe un peu jaune, un nez qui brille et une face littéralement béate (la bouche est grande ouverte), ravie d’être tournée vers Dieu. J’admire ce type de joie, la joie toujours émouvante des vieillards ; mais encore, mon regard revenant pour un temps à l’objet, ces deux touches de bleu canard semées dans cette oraison de couleurs chaudes. Ce sont les extrémités des manches royales. J’avance. Face à moi, un formidable rapt de Ganymède, anonyme, tribut manifeste à Michel-Ange. Devant ce « monstre de joie » (Cocteau), hérissé non pas de « cris et de crains » (idem) mais plutôt de plaintes et de plumes, on découvre, sous l’espèce d’un petit coffret, un exemple de cet art enchanteur : pietra dura. Voici une grande Cléopâtre d’Artemisia Gentileschi, puis une très belle toile attribuée à Bartolomeo Cavarozzi (photo), La controverse entre saint Pierre et saint Paul. Plus qu’une controverse, c’est une leçon ! non pas d’anatomie mais de théologie. Quoique, d’anatomie… Le peintre n’a pas pu inventer ces doigts-là, me dis-je, ceux de saint Pierre, laids, aux ongles affreusement courts. C’est un caravagesque. Il convoque sous son pinceau un peu de la vulgarité du monde, l’embellissant, et renforçant le message de l’œuvre. Courts, ces ongles, mais comme les facultés spéculatives de cet apôtre, dont l’embarras nous rappelle le premier saint Matthieu peint par Caravage pour l’autel de la chapelle Contarelli. Quel juste contraste avec l’homme qui l’emporta intellectuellement, l’ardent saint Paul ! Ses bouclettes, son oreille, ses pommettes sont parfaites. Son vigoureux bras gauche et ses longs doigts écartés me rappellent le Moïse de Michel-Ange.
Tout prêt à me laisser éduquer religieusement, je continue de déambuler et arrive devant le stand de la galerie Moretti. J’y suis attiré par une toile ovale de Carlo Dolci représentant un jeune homme, ou son âme, avec son ange gardien. Sujet caractéristique de l’art post-tridentin. Je note : un long doigt, de l’ocre, du vert Véronèse, du rose framboise, des bijoux dorés ; dans l’ange quelque chose des « figures de fantaisie » de Zurbarán (je pense à ses saintes « costumées » et plus encore à cet archange Gabriel à l’air si capricieux, conservé à Montpellier) ; les cheveux se confondent avec le fond ; l’adolescent croise dévotement ses mains sur sa poitrine. Superbe. Surprise ! Plus loin, deux Gerhard Richter abstraits encadrent un Antonio Vivarini. J’y vois deux petits foyers où brûlerait un feu plus jaune que le feu réel.