Banksy& Mister Guetta

Qui est Banksy ? Un artiste de rue, graffeur génial aux pochoirs précis et surprenants, qui intervient sur les murs des capitales, qui voyage, qui organise ses interventions comme des expéditions commandos, qui, vu l’ampleur de ses réalisations, agit avec une équipe rodée et aguerrie. Qui est cet artiste ? Comment travaille-t-il ? Il a décidé d’y répondre à travers un long métrage, un documentaire de 90 minutes: «Faites le mur», traduction française pour Exit Through the Gift Shop… ! Qui devait préalablement s’intituler: «Comment vendre de la M… à des C…»Et finalement tout paraît faux dans ce film qui ressemble à une fiction. Banksy raconte avoir rencontré un Français,Thierry Guetta, à Los Angeles, un marchand de fringues passionné de vidéo jusqu’à devenir «addict» de sa caméra pour des films inutiles. L’homme est un brin lourd, arrogant, sûr de lui. Et c’est à lui que l’artiste confie le documentaire avec deux impératifs: ne le filmer que de dos et soigner son anonymat. Le Français obtempère. De façon quasi maniaque, il enregistre tout ce qu’il voit, et présente à Banksy un montage du documentaire. Las, le spectateur doute. On n’imagine pas, en effet, présenter un tel travail à quiconque. Banksy, alors, l’éconduit, lui explique qu’il se débrouillera autrement pour son film et encourage le pauvre Guetta à suivre sa voie artistique. Le candide croit le mentor et se lance à son tour dans le Street art. Le film change alors de sujet. On venait voir Banksy et on suit Guetta qui...

Qui est Banksy ? Un artiste de rue, graffeur génial aux pochoirs précis et surprenants, qui intervient sur les murs des capitales, qui voyage, qui organise ses interventions comme des expéditions commandos, qui, vu l’ampleur de ses réalisations, agit avec une équipe rodée et aguerrie. Qui est cet artiste ? Comment travaille-t-il ? Il a décidé d’y répondre à travers un long métrage, un documentaire de 90 minutes: «Faites le mur», traduction française pour Exit Through the Gift Shop… ! Qui devait préalablement s’intituler: «Comment vendre de la M… à des C…»
Et finalement tout paraît faux dans ce film qui ressemble à une fiction. Banksy raconte avoir rencontré un Français,Thierry Guetta, à Los Angeles, un marchand de fringues passionné de vidéo jusqu’à devenir «addict» de sa caméra pour des films inutiles. L’homme est un brin lourd, arrogant, sûr de lui. Et c’est à lui que l’artiste confie le documentaire avec deux impératifs: ne le filmer que de dos et soigner son anonymat. Le Français obtempère. De façon quasi maniaque, il enregistre tout ce qu’il voit, et présente à Banksy un montage du documentaire. Las, le spectateur doute. On n’imagine pas, en effet, présenter un tel travail à quiconque. Banksy, alors, l’éconduit, lui explique qu’il se débrouillera autrement pour son film et encourage le pauvre Guetta à suivre sa voie artistique. Le candide croit le mentor et se lance à son tour dans le Street art. Le film change alors de sujet. On venait voir Banksy et on suit Guetta qui se compare vite à Warhol, à Jeff Koons… qui regroupe des « collaborateurs », designers, DA, maquettistes, étudiants juste sortis d’école d’art. Et il s’y croit, alors le spectateur n’y croit plus.Mégalomane ou imposteur ? Guetta n’a pas froid aux yeux et organise une exposition de son travail, pas moins de 4 000 m² loués dans d’anciens studios de cinéma. Il s’adjoint l’un des meilleurs attachés de presse du moment. Et l’événement devient un phénomène, la vente un triomphe. C’est le sacre de Thierry Guetta sous son nom d’artiste brusquement célèbre: Mr Brainwash. Banksy a le mot de la fin: «J’aurais vraiment dû faire ce film moi-même». Parce qu’on l’a perdu de vue en cours de film ?

On sort de la projection avec un peu de tournis: que croire ? Qui croire ? Brainwash et Banksy ne seraient-ils pas un seul et même homme ? Difficile à admettre: l’un a un accent vraiment frenchy et l’autre très anglais (il est originaire de Bristol). L’un est plutôt enveloppé quand l’autre semble svelte. On peut multiplier les comparaisons, les différences sont nettes. Brainwash serait-il l’opposé de Banksy ? Le premier fait de l’argent sur une pseudo-renommée, le second cultive gratuité et anonymat.

Banksy se présenterait-il à travers un portrait repoussoir ? Voudrait-il présenter son travail, comme cela a été annoncé dans la presse avant la projection ? Bien évidemment non. Faites le mur porte un regard mordant et ironique sur l’art contemporain en général et son marché en particulier. Banksy le dit: «Ce film sera pour les artistes de rue ce que “Les Dents de la mer” a représenté pour le ski nautique». Les snobs, nouveaux riches et faiseurs sont prêts à acheter n’importe quoi du moment que la presse en a parlé, que les experts se sont déplacés. C’est à fuir les galeries et les foires internationales ! Du moins, à développer un scepticisme envers le marché de l’art contemporain. Souvent on entend que telle exposition ou telle installation relève du «foutage de gueule». Dans son film, Banksy démontre que le propos n’est pas faux. À moins que son documentaire soit une fiction, ou une mise en scène d’un monde, d’un milieu, de tendances: d’un marché. Une caricature, donc.C’est bien cela que fuit le Street art. Cultivant son anonymat (parfois avec excès ?), Banksy refuse que son art ait une valeur marchande, une valeur autre que celle de l’art. Pas de pipolisation, donc, pas d’apparitions publiques. L’art et l’art seulement, gratuit et pour tous. Une mise en scène qui ressemble à une mise en garde contre le marché et la confiscation de l’art par le grand capitalisme. Au blogueur Al Scnack pour All These Wonderfull Things, Banksy jure que son film n’est pas un canular; que tout est à 100% vrai, qu’il a choisi Thierry Guetta pour son côté Groucho Marx… Et la rumeur qu’il obtienne un Oscar à Hollywood dans la catégorie «Meilleur documentaire» accélère le buzz comme cette autre, récente, de la mise aux enchères sur eBay de l’identité de l’artiste. Début janvier, en effet, le site d’enchères annonce que Banksy se révèlerait au plus offrant. Le montant atteignit un million de dollars. Autre façon de faire monter une cote !

Car tel est le sujet: la gratuité de l’art semble proportionnelle à la renommée de l’artiste. On inverse ainsi le système qui cote une œuvre sur une signature, système qui engendra tant de croûtes comme celle de Mr Brainwasch, et de malentendus. Il y a donc, dans ce film, l’expression d’un jugement mené à la Robin des Bois.On pourrait s’arrêter là. Mais Faites le mur continue de faire du bruit. Présenté hors compétition au Festival de Berlin, sorti en salles à Paris le 15 décembre 2010, le documentaire déchaîne le dithyrambe sans polémique. Un sans faute attire la sympathie. Toutefois, une voix s’est élevée: un vidéaste suisse, Joachim Levy, 34 ans, accuse Banksy d’avoir piraté des séquences entières (environ 18 minutes) d’un reportage qu’il avait lui-même réalisé. Il se plaint de n’avoir aucune réponse de l’artiste concernant ses demandes de réparation, au moins d’explications, et menace de révéler l’identité du grapheur à lapresse. L’information passe dans le Temps (29 décembre 2010) puis quelques semaines plus tard, en France, dans le Monde (12 janvier 2011). «Le Suisse serait en négociations avec l’artiste», liton finalement sur la toile. Parle-t-il du film sur Youtube ? «Joachim Levy s’exprime sur Banksy et Thierry Getta», film vu 285 fois (ce qui est peu !) et désormais introuvable, avec cette mention: «L’utilisateur a supprimé cette vidéo». Le Los Angeles Times (18 janvier 2011) se demande à son tour si tout n’est pas orchestré, jusqu’à la plainte de Joachim Levy, pour que le film continue de faire parler de lui. Une remarque du vidéaste ne laisse pas de surprendre: que l’art de la rue soit gratuit, soit, mais pas le cinéma.Banksy se serait-il fourvoyé en utilisant un art, le septième, dont les règles de production incluent nécessairement de l’argent, beaucoup d’argent ? Alors, sa philosophie de la gratuité et de l’anonymat aurait atteint sa limite. À suivre en tout cas…

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