En 2009, pour la première fois de son histoire, la maison des joailliers suisses d’origine turque Adler, organisait un concours international de création de bijoux, l’Adler Jewellery Design Award, destiné aux jeunes créateurs fraîchement issus des écoles d’art et de design du monde entier, ou encore en formation.
Le thème, « Mémoires de Femmes, Mémoire du Monde», dont le titre invite à mainte interprétation, ne découragea pas les vocations, bienau contraire. Avec plus de deux cent soixante projets soumis, dont la qualité étonna jusqu’aux aînés de cette entreprise familiale, ce fut un franc succès, preuve qu’à l’heure de la médiatisation extrême des artistes ou de certains designers, l’artisanat discret, voire secret de la création joaillière attire encore bien des talents.Les contraintes proposées par Adler – dessin réalisé à la main et non avec un logiciel 3D, obligation de choisir pour sa création l’un des trois «sets» de diamants – poussa même certains enseignants à proposer l’exercice à leurs étudiants. L’autre particularité de ce concours était la possibilité de voir passer le dessin à l’état de bijou, puisque la maison Adler se proposait de réaliser certains des projets présentés.Une première sélection, opérée par les employés de la firme réduisit à vingt-cinq le nombre des lauréats potentiels, avant que la famille Adler ne sélectionne les douze finalistes en lice pour l’un des trois prix prévus: Le «Adler Jewellery Design Award», bien sûr, mais aussi le Prix de la créativité et le Prix de la Femme, ce dernier devant être décerné par les clientes des différentes boutiques Adler de Genève, Gstaad, Londres, Moscou, Hong Kong, Tokyo et Dubaï. Enfin, un jury réunissant quelques grands noms du monde de la joaillerie et du luxe devait trancher pour désigner les deux grands gagnants.
À voir la qualité des dessins, dont certains sont réellement époustouflants – on songe en particulier au pectoral de Cécile Guénat, dessins qui durent voler quelques nuits de sommeil à leur auteur –, il est amusant de constater que les contraintes techniques semblaient largement oubliées par les postulants. Ainsi tant la Genevoise que sa consoeur turque Olcay Cavus Yilmay n’avaient guère d’idée sur la manière de réaliser leur création, au grand dam de la famille Adler d’ailleurs, séduite aussi bien par ce collier à la Gustave Klimt que par cette broche en gouttes d’eau d’une grande pureté, aussi irréalisables l’un que l’autre ! Les jeunes femmes auront au moins appris que s’il est bon pour un créateur d’avoir la tête dans les étoiles, les pieds, eux, doivent rester sur terre; une leçon que, somme toute, d’aucuns n’apprennent que bien après avoir quitté les bancs de l’école…Pour certaines des propositions, dont le lourd bracelet de la lauréate Laura Infante, le joaillier Adler formula néanmoins des suggestions ; ainsi le carbone vint remplacer le fragile ébène, trop enclin à prendre l’empreinte de chaque choc.
À la Française Emmanuelle Orth, l’entreprise, pionnière de l’introduction de matériaux nouveaux dans la tradition joaillière, suggéra également de remplacer l’or par le titane, afin d’éviter que le poids du précieux métal n’inflige un trop grand supplice à l’heureuse propriétaire d’un tel bijou. Le titane, qui a la curieuse propriété de changer de couleur selon la température à laquelle il est porté, vint donc apporter ses reflets mauves à cet original collier végétal.La Japonaise Sawako Besnard, parisienne d’adoption et récipiendaire du prix de la créativité présentait un collier aérien, faisant songer aux collerettes des dames du temps jadis, mais difficile à porter car il contraint sa propriétaire à porter les cheveux relevés en chignon afin d’en dévoiler l’entière beauté.La Française Ornella Ianuzzi, londonienne d’adoption, pour sa part s’inspira du dessin délicat d’une fougère pour réaliser une bague mariant avec sobriété et finesse le diamant à l’émeraude ; la maison Adler envisage de la produire dans un avenir proche.Enfin, dans un style épuré et moderne, De Anna Kiernan, Anglaise vivant à … Londres proposait un collier-sculpture exploitant une unique pierre en forme de poire, sur une structure en or blanc épousant et modelant tout à la fois ce qui est sans doute l’une des partie les plus sensuelle du corps féminin. Laquintessence du bijou ?