Mark Rothko Rétrospective

Rares sont les occasions de voir rassemblées les toiles du peintre américain d’origine russe, Marc Rothko. Cette année, pourtant, les amateurs d’expressionnisme abstrait peuvent se réjouir: Plusieurs villes accueillent une rétrospective de son œuvre.Rome et Munich ont déjà accueilli cette exposition en début d’année. Actuellement, elle se trouve auKunsthalle de Hambourg jusqu’au mois d’août. L’opportunité de voir tant de chefs-d’œuvre est unique et ne se représentera probablement pas avant longtemps en Europe.Les commissaires de l’exposition, le Professeur Hubertus Gassner et Oliver Wick, ont organisé un parcours original, en proposant un regard croisé sur différentes périodes artistiques. En passant par la Renaissance et le Romantisme, ils mettent en avant les «sources d’inspiration possibles» de Rothko.La sélection des peintures exposées, une centaine d’oeuvres, suit les différentes phases de la création du peintre. Dans un premier groupe, l’exposition se focalise sur des toiles de petit format, réalisées avec une préparation à base de plâtre sur laquelle est ajoutée la peinture. Cette technique picturale, prochede la peinture à fresque de la Renaissance italienne, est singulière chez un artiste moderne, mais Rothko l’utilisait peut-être pour retrouver l’aspect des fresques qu’il aimait tant, notamment celles de Fra Angelico du couvent San Marco à Florence, qu’il retournait voir dès qu’il se trouvait en Italie.Cette similitude entre la technique utilisée dans le premier groupe de toiles et la technique picturale des fresques du XIVe siècle montre une influence évidente de la peinture de la Renaissance sur la première période de Rothko, influence largement reconnue par la critique1. Il...

Rares sont les occasions de voir rassemblées les toiles du peintre américain d’origine russe, Marc Rothko. Cette année, pourtant, les amateurs d’expressionnisme abstrait peuvent se réjouir: Plusieurs villes accueillent une rétrospective de son œuvre.
Rome et Munich ont déjà accueilli cette exposition en début d’année. Actuellement, elle se trouve auKunsthalle de Hambourg jusqu’au mois d’août. L’opportunité de voir tant de chefs-d’œuvre est unique et ne se représentera probablement pas avant longtemps en Europe.Les commissaires de l’exposition, le Professeur Hubertus Gassner et Oliver Wick, ont organisé un parcours original, en proposant un regard croisé sur différentes périodes artistiques. En passant par la Renaissance et le Romantisme, ils mettent en avant les «sources d’inspiration possibles» de Rothko.La sélection des peintures exposées, une centaine d’oeuvres, suit les différentes phases de la création du peintre. Dans un premier groupe, l’exposition se focalise sur des toiles de petit format, réalisées avec une préparation à base de plâtre sur laquelle est ajoutée la peinture. Cette technique picturale, prochede la peinture à fresque de la Renaissance italienne, est singulière chez un artiste moderne, mais Rothko l’utilisait peut-être pour retrouver l’aspect des fresques qu’il aimait tant, notamment celles de Fra Angelico du couvent San Marco à Florence, qu’il retournait voir dès qu’il se trouvait en Italie.Cette similitude entre la technique utilisée dans le premier groupe de toiles et la technique picturale des fresques du XIVe siècle montre une influence évidente de la peinture de la Renaissance sur la première période de Rothko, influence largement reconnue par la critique1. Il reconnaissait lui-même son attirance pour cette période artistique. Il écrivait dans son carnet de notes: «La grandeur dont je parle est celle d’un homme, ou mieux, la mienne, par rapport à mes choix, cette grandeur (personnelle) est la meilleure que l’homme puisse rejoindre. Dans cette optique je suis un homme de la Renaissance, puisque mes toiles représentent une mesure subjective de mes valeurs morales.»2

Lorsqu’il peignait Homage to Matisse (1954), en hommage à l’artiste vénéré, il notait : «Couleur-Matisse / Valeur-Renaissance» ou encore: «la solitude de Matisse». D’autres notes montrent aussi que, peu avant la réalisation de cet hommage, Rothko travaillait tout en réfléchissant à la peinture de la Renaissance. En effet, dans le Golde’s Composition Book (cahier d’esquisses, 1947-49), un dessin au crayon présente une grande affinité avec cette toile et pourrait en être une esquisse préparatoire.L’esquisse préparatoire à la toile Homage to Matisse fait d’emblée penser à une œuvre emblématique de la Renaissance; le fameux Homme de Vitruve, de Léonard de Vinci. Toutefois, son influence ne doit pas être comprise comme modèle direct mais entendue en terme d’affinité intellectuelle, comme si l’esquisse devenait une sorte d’intériorisation de l’idée d’homme et de proportion.Dans certaines oeuvres, c’est le cas pour Homage to Matisse, le désir de conformer la dimension de la toile à la stature de l’homme se traduit par le choix d’un format allongé. Il faut reconnaître que la similitude des proportions entre cette peinture et l’esquisse préparatoire est frappante.Qui aurait pensé que, pour peindre une toile abstraite comme Homage to Matisse, Rothko se soit penché sur les dessins de Léonard de Vinci ? Qu’il se soit inspiré, pour les proportions, de la main du peintre florentin ? Pourtant, Rothko manifestait un intérêt immense pour les peintres de la Renaissance italienne, et notamment pour Giotto, Titien et Tintoretto. Il les considérait comme les maestri de la couleur, il les admirait pour leur utilisation de la lumière comme moyen d’expression. Quant à l’utilisation de la peinture à l’huile, elle leur permettait de rendre des contrastes fabuleux entre la lumière et l’ombre. C’est probablement pour retrouver cette luminosité des couleurs que Rothko recourait à la technique de ces artistes. Dans ce même but, retrouver la luminosité, si importante pour lui car elle est le moyen de communiquer avec le spectateur, Rothko mélangeait les acryliques, la peinture à l’huile et la peinture à l’œuf. Ce n’est pas un hasard si les peintures les plus admirées et les plus connues de Rothko sont les plus lumineuses. La luminosité de ses grands formats colorés est comme une émanation mystérieuse de la peinture; ces toiles fascinent, enfin, par la qualité extraordinaire des couleurs et parce qu’elles traduisent ce qu’il voulait exprimer avant tout, c’est-à- dire des émotions et de la sensualité.3Par la suite, dans les années 1960, la luminosité de ses peintures ne sera plus la même. Rothko n’utilise plus que de l’acrylique. Les couleurs vives, les rouges, les oranges et lesjaunes de la première période (années 50-60) se transforment en une série de toiles noires intitulées Blackform Paintings.Pour achever le parcours dans l’univers de Rothko, les commissaires de l’exposition ont choisi les dernières toiles intitulées Black on Gray Paintings, qui nous montrent le sommet d’un art toujours plus sombre mêlé à un sens quasi mystique de l’espace.Les trois voyages de Mark Rothko en Italie, dans les années 50-60, ont été sans aucun doute une source d’inspiration féconde pour sa propre œuvre. Il parlait souvent du bouleversement ressenti devant les fresques de Fra Angelico ou devant les rouges vifs de Pompéi. Dans l’essai intitulé La réalité de l’artiste, il reconnaît l’importance de ces découvertes artistiques et leur influence émotionnelle sur son propre travail. Il accorde même une place centrale aux œuvres et aux techniques des grands peintres de la Renaissance italienne et les place au fondement de son art.

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