Déesse grecquen terre cuite

Lorsque, au cours des guerres entre Grecs et Perses, Athènes fut prise, en 480 av. J.-C., les monumentsde l’Acropole subirent une destruction complète. Or,quand les habitants reprirent possession des lieux, ilsensevelirent sur place, très soigneusement, les vestigesqui jonchaient le site. Cet acte de piété représentaune aubaine pour les archéologues. En effet, lors desfouilles de 1885-1891, ils tombèrent sur un vaste dépôt,au nord-ouest du temple de l’Érechthéion, contenantquatorze Korés, partiellement brisées, mais dans un étatde fraîcheur surprenant. Cette découverte, rapidementpubliée, eut un immense retentissement. Revenues à lalumière, après plus de 2500 ans, ces statues offraient aumonde émerveillé l’image la plus pure de l’art archaïquegrec, qui devint du coup la période préférée desesthètes, aux dépens du classicisme, enseigné dans lesécoles en qualité de référence absolue. Àl ’instar des anciens Grecs eux-mêmes, les archéologues et les historiens de l’art appellent Koré (jeunefille, vierge), la représentation en ronde-bosse d’une femme dans la fleur del’âge, qui se présente debout, à l’arrêt, un pied légèrement avancé. Contrairement à son pendant, le Kouros (jeune homme), elle n’est pas nue, mais parée d’un vêtement dissimulant entièrement ses jambes.La Koré décrite ici, qui appartient à une collection américaine, représentée par une galerie suisse, n’est pas en marbre comme cellede l’Acropole, mais en terre cuite, techniquemoins onéreuse, et donc davantage répandue.L’œuvre a été exécutée en plusieurs pièces,trois au minimum, soigneusement raccordées. Haute de 62,2 cm, elle repose sur unpetit socle carré, très bas et soudé aux pieds.La femme s’offre au regard en position parfaitement frontale. Elle porte une robe entissu...
Lorsque, au cours des guerres entre Grecs et Perses,

Athènes fut prise, en 480 av. J.-C., les monumentsde l’Acropole subirent une destruction complète. Or,quand les habitants reprirent possession des lieux, ilsensevelirent sur place, très soigneusement, les vestigesqui jonchaient le site. Cet acte de piété représentaune aubaine pour les archéologues. En effet, lors desfouilles de 1885-1891, ils tombèrent sur un vaste dépôt,au nord-ouest du temple de l’Érechthéion, contenantquatorze Korés, partiellement brisées, mais dans un étatde fraîcheur surprenant. Cette découverte, rapidementpubliée, eut un immense retentissement. Revenues à lalumière, après plus de 2500 ans, ces statues offraient aumonde émerveillé l’image la plus pure de l’art archaïquegrec, qui devint du coup la période préférée desesthètes, aux dépens du classicisme, enseigné dans lesécoles en qualité de référence absolue.

Àl ’instar des anciens Grecs eux-mêmes, les archéologues et les historiens de l’art appellent Koré (jeunefille, vierge), la représentation en ronde-bosse d’une femme dans la fleur del’âge, qui se présente debout, à l’arrêt, un pied légèrement avancé. Contrairement à son pendant, le Kouros (jeune homme), elle n’est pas nue, mais parée d’un vêtement dissimulant entièrement ses jambes.La Koré décrite ici, qui appartient à une collection américaine, représentée par une galerie suisse, n’est pas en marbre comme cellede l’Acropole, mais en terre cuite, techniquemoins onéreuse, et donc davantage répandue.L’œuvre a été exécutée en plusieurs pièces,trois au minimum, soigneusement raccordées. Haute de 62,2 cm, elle repose sur unpetit socle carré, très bas et soudé aux pieds.La femme s’offre au regard en position parfaitement frontale. Elle porte une robe entissu épais (péplos), elle-même passée sur unefine tunique (chiton), laquelle «casse» sur lespieds. Un mantelet (épiblèma) pend dans sondos et sur les côtés. Le vêtement tombe droit,soulignant les seins, mais pas les hanches niles jambes. La tête est ovale, avec des yeuxgrands et étirés, un nez droit et fort, des pommettes hautes et saillantes, une bouche étroiteaux lèvres épaisses, esquissant le fameux «sourire». L’épaisse chevelure, ondulée sur le front,descend sur les épaules en mèches crantées, symétriquement écartées. Un diadème, des boucles d’oreille et un collier complètent la tenue.De sa main gauche abaissée, la femme tient une couronne végétale. De l’autre, ramenée sur la poitrine, un objet mutilé, probablement une fleur, voire une grenade, symbolisant la fertilité.

L’artisan, que les Grecs nommaient coroplathe, littéralement «modeleur de Korés», a recouru à la peinture pour représenter ou mettre en évidence certains détails de sa figure. Ainsi les sourcils, le contour des yeux et les prunelles sont peintes en noir, les lèvres en rouge. En rouge aussi le collier. Quant à l’ornementation du vêtement, soit la dentelure au col et les fleurs de lotus disposées en bande verticale sur le devant, elle mêle du bleu au rouge. Un large galon, ocre plutôt que rouge, marque les bords du manteau.Considérée dans son ensemble, la sculpture frappe par le contraste entre la tête, parfaitement tridimensionnelle, et le corps, plutôt plat, comme taillé dans une poutre. Et c’est la tête, justement, qui offre de bons critères de datation. Une datation assez basse, qui pourrait être le dernier quart du VIe siècle avant J.-C.Mais comment interpréter cette statue ? Le diadème et le riche vêtement donnent à penser qu’elle représente une divinité, probablement Déméter, ou sa fille Perséphone, la Koré par excellence. Toutes deux sont liées à la fertilité de la terre, particulièrement au blé et aux moissons. Selon le mythe, Perséphone fut enlevée par Hadès, frère de Zeus et roi des Enfers. Sa mère éplorée, Déméter, se lança à sa recherche, délaissant sa fonction divine. Pour faire renaître l’abondance dans les champs, Zeus se vit contraint d’intervenir. Et comme il ne parvenait pas à ramener la déesse à la raison, il s’occupa lui-même de la libération de sa fille. Hadès finit par accepter de rendre la captive, devenue entre-temps son épouse, non sans lui avoir fait manger à son insu quelques grains de grenade. D’où l’obligation pour Perséphone de passer désormais une partie de l’année avec son mari dans le monde souterrain et, le reste du temps, auprès de sa mère, à la lumière du soleil.Le culte de Déméter et Perséphone, rattaché au rythme des saisons, comptait parmi les plus importants. Aux initiés, ce culte promettait la prospérité et la renaissance après la mort.Il est probable que l’œuvre qu’on vient de décrire provient d’une région où le culte en question se trouve particulièrement bien attesté, aussi bien par les sources antiques que par les découvertes archéologiques. C’est-à-dire la Grande Grèce et la Sicile, riches en blé. C’est d’ailleurs en Sicile, dans la plaine d’Enna, que la plupart des auteurs situent l’enlèvement de Perséphone.

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