Des femmes photographes au MOMA

Sous les auspices de son légendaire conservateurphotographe, Edward Steichen – qui donne son nom aux galeries dédiées à la photographie – le Museum of Modern Art de New York présente environ deux cents clichés tirés de ses gigantesques fonds, pour retracer une histoire du medium photographique. La particularité de toutes ces photos, qui s’échelonnent des années 1850 jusqu’au 19 juin 2008 pour la plus récente, c’est qu’elles ont été réalisées par des femmes.Aux côtés de photographes bien connues comme Dorothea Lange, Lee Miller ou Cindy Sherman, on aura le plaisir de découvrir ouredécouvrir des figures plus secrètes, comme l’étrange Claude Cahun, Ilse Bing la bien oubliée «Reine du Leica», Lucia Moholy, dont la postérité s’est effacée derrière le renom de son mari ou encore Helen Levitt, récemment décédée à New York, ville dont elle avait su rendre l’âme dans d’extraordinaires photographies en couleurs, dans les années 60. Nulle volonté préconçue ici, hormis celle que laisse entrevoir l’exposition elle-même; il n’est pas question de démonstration ou de thèse à défendre, simplement une thématique, dont l’arbitraire se justifie amplement, à déambuler entre les cimaises, tant celles-ci présentent de chefs d’œuvres, féminins donc.Lucia Moholy a réalisé ce portrait de Florence Henri en 1927, probablement à Dessau où le Bahaus, qui a été contraint de quitter Weimar en 1925 sous la pression des cercles nationalistes, a trouvé refuge. La photographe a produit nombre des images et des portraits associés à cette école, où son mari Lazló Moholy-Nagy enseigne depuis 1923 et où Florence Henri...

Sous les auspices de son légendaire conservateurphotographe, Edward Steichen – qui donne son nom aux galeries dédiées à la photographie – le Museum of Modern Art de New York présente environ deux cents clichés tirés de ses gigantesques fonds, pour retracer une histoire du medium photographique. La particularité de toutes ces photos, qui s’échelonnent des années 1850 jusqu’au 19 juin 2008 pour la plus récente, c’est qu’elles ont été réalisées par des femmes.
Aux côtés de photographes bien connues comme Dorothea Lange, Lee Miller ou Cindy Sherman, on aura le plaisir de découvrir ouredécouvrir des figures plus secrètes, comme l’étrange Claude Cahun, Ilse Bing la bien oubliée «Reine du Leica», Lucia Moholy, dont la postérité s’est effacée derrière le renom de son mari ou encore Helen Levitt, récemment décédée à New York, ville dont elle avait su rendre l’âme dans d’extraordinaires photographies en couleurs, dans les années 60. Nulle volonté préconçue ici, hormis celle que laisse entrevoir l’exposition elle-même; il n’est pas question de démonstration ou de thèse à défendre, simplement une thématique, dont l’arbitraire se justifie amplement, à déambuler entre les cimaises, tant celles-ci présentent de chefs d’œuvres, féminins donc.Lucia Moholy a réalisé ce portrait de Florence Henri en 1927, probablement à Dessau où le Bahaus, qui a été contraint de quitter Weimar en 1925 sous la pression des cercles nationalistes, a trouvé refuge. La photographe a produit nombre des images et des portraits associés à cette école, où son mari Lazló Moholy-Nagy enseigne depuis 1923 et où Florence Henri elle-même étudie en 1927-1928.La composition très étudiée de ce portrait, avec son cadrage asymétrique, resserré au point de couper une partie de la tête du modèle, et ses tonalités sombres très appuyées, est typique des années 1920 et 1930. Les photographes cherchent alors à se libérer de la tradition pictorialiste et multiplient les expériences formelles, cherchant à mettre l’optique au service d’un propos, ou d’un parti pris artistique. L’image respire la modernité et l’audace, qui sont celles de la photographe autant que du modèle.De tous les autoportraits d’Ilse Bing, celui que présente le musée new yorkais est sans nul doute le plus réussi. Cette photographie, réalisée à Paris en 1931, est une icône, que la vieille dame avait d’ailleurs accepté de reproduire en 1986, en couleurs, sous l’objectif du photographe allemand Abe Frajndlich. Sur cette image, le regard de la jeune femme, légèrement décalé au-dessus de son Leica, fixe le spectateur, tandis qu’un second miroir, placé sur le côté, lui renvoie son profil. Aux yeux noirs d’Ilse Bing vient faire écho l’œil unique de l’objectif, et ce regard, déconstruit et démultiplié par le jeu de reflets, devient une métaphore de la photographie elle-même, de ce qu’elle représente et de ce qu’elle implique dans l’esprit des photographes de l’époque.Cindy Sherman, dont on présente ici l’une des images de la série Centerfolds, a joué tout au long de sa carrière avec les clichés. Usant du travestissement pour incarner de façon plus oumoins reconnaissable des stéréotypes – personnages, situations ou objets, elle place le spectateur au milieu d’une narration ou d’un paradigme, à charge pour lui de compléter l’image avec les moyens dont il dispose.Cette série, créée pour le magazine Artforum (qui la refusa), adopte le format de doublepage horizontale propre aux revues de charme. Les poses prises par l’artiste, les habits qu’elle porte, la mise en scène et les artifices photographiques même – ici les cheveux et les vêtements humides – renvoient clairement à une typologie de la photo érotique populaire. Ici comme dans tous les travaux de Sherman, l’utilisation de l’artiste comme seul et unique modèle – paradoxalement pour des raisons au départ purement pratiques – instille la critique derrière la parodie, questionnant notre conditionnement par les images topiques qui nous environnent.Au-delà d’une évidente jubilation du travestissement – et de la transgression qu’il autorise éventuellement –, les tenants et les aboutissants précis de l’art de Sherman, d’une manière générale, sont parfois difficiles à saisir, tant l’œuvre se tient à l’écart de la théorie. Son mystère tient justement dans sa capacité à bâtir de manière instinctive, avec ses «images d’images», une théorie critique finalement bien plus plaisante et plus digeste que toutes les sémiologies.

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