IGOR USTINOV SCULPTEUR

La Galerie d’ArtPassions accueille en cette fin d’année, aux côtés du photographe Richard de Tscharner, le sculpteur Igor Ustinov. Issu d’une longue lignée d’artistes, le fils de Sir Peter Ustinov s’est installé à Lausanne. Rencontre. L’un des premiers traits qui frappent dans votre sculpture, c’est l’absence de physionomie. Vos personnages sont humanoïdes sans ambiguïté, clairement sexués, mais sont systématiquement dépourvus de tête et de visage… Igor Ustinov: J’ai effectivement créé une morphologie très reconnaissable, qui est à moi. Mon premier personnage de ce type s’appelait Le Mathématicien; l’idée était que l’homme, contrairement à la plupart des animaux, a conscience de son unité, qui est fondatrice de son rapport au monde, de la manière dont il le «calcule». Et donc ce personnage, masculin, était une sorte de grand, une unité qui marchait. Ensuite, j’ai fait des femmes, qui étaient des, parce qu’en elles, elles ont la dualité de la procréation et que ma vision d’homme, de sculpteur est qu’elles ont besoin de réaliser ce double pour être accomplies… Il y a l’idée de genèse aussi… J’ai ensuite développé cette morphologie, qui n’est pas exactement la morphologie humaine, qui est plus stylisée, plus tendue et dynamique parce que je cherche à exprimer dans mes sculptures l’énergie fondamentale qu’il y a dans l’être humain, le désir et la volonté en mouvement. En enlevant ces visages, on peut exprimer des choses qui sans cela seraient très violentes, trop peut-être. Une autre chose frappe nécessairement l’amateur d’art devant certaines de vos pièces, c’est la parenté avec...

La Galerie d’ArtPassions accueille en cette fin d’année, aux côtés du photographe Richard de Tscharner, le sculpteur Igor Ustinov. Issu d’une longue lignée d’artistes, le fils de Sir Peter Ustinov s’est installé à Lausanne. Rencontre.

L’un des premiers traits qui frappent dans votre sculpture, c’est l’absence de physionomie. Vos personnages sont humanoïdes sans ambiguïté, clairement sexués, mais sont systématiquement dépourvus de tête et de visage…

Igor Ustinov: J’ai effectivement créé une morphologie très reconnaissable, qui est à moi. Mon premier personnage de ce type s’appelait Le Mathématicien; l’idée était que l’homme, contrairement à la plupart des animaux, a conscience de son unité, qui est fondatrice de son rapport au monde, de la manière dont il le «calcule». Et donc ce personnage, masculin, était une sorte de grand, une unité qui marchait. Ensuite, j’ai fait des femmes, qui étaient des, parce qu’en elles, elles ont la dualité de la procréation et que ma vision d’homme, de sculpteur est qu’elles ont besoin de réaliser ce double pour être accomplies… Il y a l’idée de genèse aussi… J’ai ensuite développé cette morphologie, qui n’est pas exactement la morphologie humaine, qui est plus stylisée, plus tendue et dynamique parce que je cherche à exprimer dans mes sculptures l’énergie fondamentale qu’il y a dans l’être humain, le désir et la volonté en mouvement. En enlevant ces visages, on peut exprimer des choses qui sans cela seraient très violentes, trop peut-être.

Une autre chose frappe nécessairement l’amateur d’art devant certaines de vos pièces, c’est la parenté avec Giacometti…

Nous appartenons effectivement à la même famille de sculpteurs. Nous sommes tous deux des sculpteurs modeleurs, et surtout nous sommes de ceux parmi bien d’autres qui aiment plus l’espace que la matière elle-même et qui ont placé l’humain au centre de leur propos. Mes sculptures sont avant tout des idées, de la philosophie, et pour rendre cela c’est le jeu de l’espace qui me convient le mieux. Par contre, mes sculptures essaient d’exprimer le dynamisme du vivant, alors que l’œuvre de Giacometti dépeint un humain beaucoup plus sombre, plus triste même.

Vous savez, je pense que l’une des particularités de la sculpture par rapport aux autres arts se situe dans son rapport à la vie. Le sculpteur prend son rêve, son lot d’émotions et essaie de le mettre dans la réalité; la plupart des autres arts, comme la photographie, la peinture ou l’écriture, procèdent à l’inverse et cherchent à extraire de la réalité un rêve. Peut-être cela revient-il au final à la même chose… mais le geste est différent.

Léonard de Vinci disait que la peinture était cosa mentale. Dans le cas de la sculpture, il s’ajoute une dimension clairement physique au processus de création. Vous parliez de Giacometti et de vous, en tant que modeleurs, comme membres d’une même «famille» de sculpteurs…

Oui, il y a les tailleurs et les modeleurs; ce sont deux façons de penser, deux sensibilités très différentes. Je suis plutôt un modeleur, même s’il m’arrive de devoir tailler pour retravailler certaines grandes sculptures. Mais cela dépend aussi du sculpteur, de sa manière de travailler. Certains «tripotent» toute une journée pour ne rien faire finalement; moi je pars d’une idée déjà présente dans mon esprit, et je l’exécute.

Je me souviens d’une anecdote à propos d’un camarade aux Beaux-Arts à Paris, un tailleur, qui avait reçu en cadeau d’un membre de sa famille un magnifique bloc de granit de 1,30 mètre de haut. Il a commencé à taper dedans sans savoir vraiment ce qu’il voulait faire, et à force d’essais, de repentirs, il a fini par faire une petite tête haute comme ça ! Pendant les sept mois de son année aux Beaux-Arts, il a fait de la poussière; de la poussière avec beaucoup de souffrance et d’hésitations … Mais d’une certaine manière, c’est aussi un apprentissage de la sculpture.

Ce personnage unitaire, archétypal que l’on rencontre dans vos sculptures est souvent d’une présence démultipliée, montré dans plusieurs états successifs ou même simultanés mais souvent antagonistes. Cela aussi participe à la qualité de la tension que l’on perçoit dans votre travail…

Oui, L’Homme qui sort de terre, par exemple, présente l’aspiration spirituelle d’une manière très littérale, et là, le personnage est seul. Mais dans Emphase, ou Envers et contre tout, c’est aussi un seul et même personnage !

L’homme perché sur les épaules de l’autre traduit, lui aussi, l’aspiration spirituelle, et c’est en fait sur ses propres épaules qu’il est perché, et des aspirations beaucoup plus charnelles risquent de le déséquilibrer…

Dans Emphase, c’est encore une tension qui s’exprime entre le mouvement et l’absence de mouvement, entre la pulsion de vie et la pulsion de mort, finalement…

J’ai songé un moment à utiliser le verre pour rendre cet état émotionnel contradictoire, ces tensions contraires qui peuvent s’exercer au sein d’un individu. Cette dualité m’intéresse, en tant qu’elle est le lieu d’une cristallisation du désir, de la volonté. C’est là le grand mystère.

Thaddaeus Ropac à Pantin et Larry Gagosian au Bourget ont ouvert chacun une luxueuse et spectaculaire galerie. Heureux Anselm Kiefer: il trône dans ces deux royaumes qui consacrent Paris comme capitale de l’art monumental !

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