BSI SA, qui a pour tradition de soutenir l’art et la culture, offre au public en son siège de Lugano et dans ses succursales en Suisse une exposition particulièrement attrayante, qui présente l’Antiquité sous un jour inhabituel. En effet, quand on pense à l’Antiquité, ce sont les pyramides, les temples, les statues qui s’imposent à l’esprit. Pourtant ces époques reculées se sont exprimées aussi (surtout ?) dans les arts mineurs, spécialement ceux qui touchent aux matières précieuses. Hier comme aujourd’hui, l’or et les gemmes exerçaient une fascination sans pareille. Et ces matériaux nobles ont été travaillés avec le même soin et le même génie qu’on a mis dans les œuvres monumentales. D’où le titre de «La beauté miniature» sous lequel sont rangées les antiquités rassemblées dans cette exposition, accompagnée d’un riche catalogue.
Cette exposition couvre un vaste champ, depuis la Mésopotamie sumérienne jusqu’à l’époque byzantine incluse, soit plus de4’000 ans de développement ininterrompu. Elle rassemble des pièces qui se signalent par leur rareté et leur qualité exceptionnelle.Chacune représente une prouesse technique, qu’on ne saura pas égaler avant la Renaissance. Pourtant les artisans de l’Antiquité ne disposaient que de moyens rudimentaires: poudre abrasive, mèches à la dureté relative, simple archet pour les faire tourner et quelques autres outils tranchants. Pire, la lentille grossissante n’existait pas ! Le travail du graveur prenait donc un temps considérable qu’on peut estimer en mois, voire en années pour certains camées. D’où le prix très élevé atteint par ces petits objets qui, d’utilitaires qu’ils étaient à l’origine (cachets), devinrent des parures, symbole de luxe et de statut social. On en faisait des collections, Mithridate, Pompée et Jules César donnant l’exemple.
1. Sceau. Sumer (Mésopotamie), vers 3000 avant J.-C.Or. Larg. 2,17 cm; épaisseur 1,6 cm.Destiné à marquer des tablettes d’argile molle, ce sceau ou cachet a l’aspect d’un oiseau de proie, qui paraît guetter sa proie. Le revers, soigneusement cloisonné, représente, à une échelle moindre, d’autres animaux, lion, chèvre, poisson, crabe ou scorpion. Un trou percé de part et d’autre de l’objet suggère qu’on le portait au cou, en guise de bijou ou d’amulette.
2. Figurine. Époque proto-sumérienne, vers 3000 avant J.-C.Cristal de roche. Larg. 5,3 cm.Le bloc de cristal, plus ou moins cylindrique, est taillé en forme de léopard couché, prêt à bondir. Des trous, forés par tout le corps, représentent les ocelles ou taches caractérisant cette race de félin, qu’on savait apprivoiser pour la chasse. On ne connaît pas de pièce semblable à la même époque.
3. Tête. Assyrie, VIIe/VIe siècle avant J.-C. Cornaline. Haut. 2,6 cm.Perforée pour le passage d’une aiguille de bronze, cette tête aux traits hideux appartient à Pazuzu, «roi des esprits mauvais de l’air». Personnification du vent brûlant qui souffle du Sud et amène les orages mais aussi la fièvre, il s’opposait à tous les bons génies. Cependant sa puissance néfaste pouvait être annihilée par l’exorcisme et c’est pourquoi on le trouve si souvent représenté, notamment en guise d’amulette
4. Sceau-cylindre. Perse achéménide, 450/350 avant J.-C. Calcédoine. Long. 3,4 cm.Ce genre de cylindre servait à cacheter les documents officiels. En le roulant sur l’argile fraîche, le décor gravé à l’entour s’y imprimait en relief, sous forme d’une frise ou bandeau. Dans cet exemplaire, la scène inscrite est centrée sur la figure du roi en tant que «maître des animaux» (deux lions vivants tenus par une patte). La monture en or est antique.
5. Intaille. Art grec. Ve siècle avant J.-C.Calcédoine. 2,68 x 2,08 cmLe graveur a su parfaitement rendre l’allure gracile du héron, posé sur une patte et occupé à épouiller son plumage. Dans la mythologie égyptienne, le héron pourpré incarnait l’abondance apportée par la crue du Nil. En Grèce, il prit le nom de Phénix, oiseau fabuleux censé renaître de ses cendres.»
6. Intaille. Grèce, IVe siècle avant J.-C. Calcédoine. 2,5 x 1,85 cm.A cause du thyrse qu’il tient comme un sceptre, ce jeune homme trônant doit être identifié à Dionysos, dieu du vin et de l’extase mystique, qui assure à ses adeptes une sorte de salut. Cette gemme proviendrait de Chios, patrie de Déxaménos, le grand graveur de l’époque classique (450/400 avant J.-C.) dont on connaît le nom par quelques pièces signées, notamment un superbe portrait, l’un des plus anciens de l’art grec. Par sa qualité, l’œuvre décrite ici s’inscrit dans cette noble tradition.
7. Camée. Fin du Ier siècle avant J.-.C./début du suivant. Agate (variétéde calcédoine), 3,01 x 2,15 cm.Cette gemme, taillée en relief dans une agate à deux couches, offre un superbe exemple du portrait à la romaine, en l’occurrence celui d’Octave Auguste, couronnée de laurier, tel qu’on le représente sur les monnaies. Dans ce cas, le profil est endommagé, mais l’œil intact, à l’expression calme et déterminée, suffit à exprimer la majesté du modèle.
8. Intaille. Art romain du Ier après J.-C.Cornaline. 2 x 1,5 cm.Tête de femme caractérisée par ses traits un peu lourds, son œil globuleux et sa chevelure longue et sans apprêt, qui lui confère un air sauvage. Il faut reconnaître ici Méduse, le monstre au regard pétrifiant, qui épouvantait non seulement les hommes, mais aussi les dieux. En portant sur soi l’image de ce démon, on espérait détourner son pouvoir malfaisant.
9. Ronde-bosse. Art romain du Ier siècleaprès J.-C. Calcédoine. 2,28 cm.Petite tête sculptée dans un bloc de calcédoine, brillant et translucide, tirant sur le bleu. C’est celle d’une jeune femme, dont la beauté se trouve mise en valeur par un diadème. Au premier coup d’œil, on penserait à l’image intemporelle de Vénus. Mais l’arrangement de la coiffure, à la mode sous le règne des Julio-Claudiens suggère qu’il s’agit en réalité du portrait d’un membre de la famille impériale.
10. Ronde-bosse. Art romain du Ier/IIe siècle après J.-C., Calcédoine.Haut 11,6 cm.Empereur trônant revêtu de la cuirasse et d’un manteau. L’absence de la tête, aujourd’hui perdue, ne permet pas d’identifier le souverain, mais d’après le style de la statuette, on peut affirmer qu’il régnait avant le troisième siècle. La rareté et le grand prix de la matière employée sont bien en rapport avec une effigie impériale.
11. Intaille. Art romain entre 150 et 200 après J.-C. Émeraude 2 x 1,5 cm.La comparaison avec les monnaies permet de mettre un nom sur ce portrait avec certitude: Lucius Verus, frère adoptif de Marc Aurèle, qui régna avec lui de 161 à 169, année de sa mort. Au moment de son accession au trône, Lucius Vérus avait 30 ans et les auteurs anciens disent qu’il était beau, séduisant et plein d’allant, amateur de plaisirs contrairement à son frère, adepte de la philosophie stoïcienne.
12. Camée. Art byzantin du XIe/XIIe siècle. Améthyste. 2,96 x 2,29 cm.Cet important camée, taillé dans une gemme de grande pureté, figure le Pantocrator (le Tout-Puissant), tenant les Écritures de la main gauche et bénissant de l’autre. L’inscription, en caractères grecs, est l’abréviation de son nom: Jésus Christ. La qualité du travail, alliée à la richesse du matériau plaide en faveur d’une attribution à un atelier de la capitale, Byzance.
13. Sceau. Art byzantin du XIe/XIIIe siècle. Lapis-lazuli. Long. 3,71 cm.Ce sceau luxueux porte l’image du Christ accompagné de son monogramme. L’étui en or est garni d’entrelacs. Quant à la bélière, qui permettait de porter l’objet au cou, elle comporte deux grosses perles. Le style de la gravure sur le sceau renvoie au monnayage d’argent de l’empereur Jean V Paléologue.