Paul Klee le théâtre de la vie

Le Zentrum Paul Klee a entrepris dès 2006, une recherche approfondie (parmi les 4000 pièces qui constituent le fonds muséal !) sur les rapports de l’artiste avec le théâtre. Cette recherche a donné lieu à deux expositions, l’une à Bruxelles (Paul Klee. Le Théâtre de la vie. Palais des Beaux-Arts, Bruxelles, du 1er mars 2008 au 11 mai 2008), l’autre à Berne (Paul Klee - Überall Theater. Zentrum Paul Klee, Berne, du 28 juin 2007 au 6 janvier 2008). Un livre paraît aujourd’hui à l’occasion de ces deux expositions.Contrairement à de nombreux artistes, Paul Klee (1879 – 1940) n’a jamais travaillé pour le théâtre ou le cinéma. On mentionnera,avec un clin d’œil, le théâtre de marionnettes qu’il a confectionné pour son fils Félix qui, pour sa part, a consacré une grande partie de sa vie à la mise en scène de théâtre. Ces marionnettes à gaine, faites de plâtre et de pièces de récupération, sont d’ailleurs exposées au Centre Paul Klee.L’artiste a failli, en 1914, accepter de concevoir des décors de théâtre pour le Künstlertheater de Munich. C’est à peu près tout. Pourquoi ce refus de s’impliquer comme artiste dans le champ du spectacle, alors qu’il en était fou ? Lui qui courait l’Europe pour assister à des mises en scène d’opéra, genre dont il raffolait - il aurait assisté durant sa vie à 300 représentations ! C’est que Paul Klee trouvait plus intéressant, non de participer à la création d’un spectacle, mais de capter la gestique des acteurs et...

Le Zentrum Paul Klee a entrepris dès 2006, une recherche approfondie (parmi les 4000 pièces qui constituent le fonds muséal !) sur les rapports de l’artiste avec le théâtre. Cette recherche a donné lieu à deux expositions, l’une à Bruxelles (Paul Klee. Le Théâtre de la vie. Palais des Beaux-Arts, Bruxelles, du 1er mars 2008 au 11 mai 2008), l’autre à Berne (Paul Klee – Überall Theater. Zentrum Paul Klee, Berne, du 28 juin 2007 au 6 janvier 2008). Un livre paraît aujourd’hui à l’occasion de ces deux expositions.
Contrairement à de nombreux artistes, Paul Klee (1879 – 1940) n’a jamais travaillé pour le théâtre ou le cinéma. On mentionnera,avec un clin d’œil, le théâtre de marionnettes qu’il a confectionné pour son fils Félix qui, pour sa part, a consacré une grande partie de sa vie à la mise en scène de théâtre. Ces marionnettes à gaine, faites de plâtre et de pièces de récupération, sont d’ailleurs exposées au Centre Paul Klee.L’artiste a failli, en 1914, accepter de concevoir des décors de théâtre pour le Künstlertheater de Munich. C’est à peu près tout. Pourquoi ce refus de s’impliquer comme artiste dans le champ du spectacle, alors qu’il en était fou ? Lui qui courait l’Europe pour assister à des mises en scène d’opéra, genre dont il raffolait – il aurait assisté durant sa vie à 300 représentations !

C’est que Paul Klee trouvait plus intéressant, non de participer à la création d’un spectacle, mais de capter la gestique des acteurs et des chanteurs: il y voyait un matériau dont il pourrait largement faire usage dans son travail. À l’opéra, les gestes sont pathétiques, les sentiments s’expriment avec ostentation: du pain bénit pour l’artiste qui les transcrit avec férocité, mais aussi avec ironie sur le papier ou sur la toile. D’ailleurs, Klee ne se rendait jamais à l’opéra sans ses jumelles, afin d’observer intensément les expressions et les mimiques des chanteurs. Jumelles qu’il utilisait d’ailleurs aussi dans la rue pour observer les visages des passants.Nous y voilà: ce qui intéresse vraiment Paul Klee, c’est le théâtre… de la vie. Et tout au long de sa carrière, il va essayer de puiser, dans les arts du spectacle, tout ce qu’il y a d’excessif, de caricatural, de grotesque, afin de nourrir son observation de la société et d’en accentuer les traits. C’est pourquoi Klee n’était pas fanatique du théâtre, trop proche de la vie réelle, ni du cinéma, quoique dans les débuts du septième art, le jeu forcé des acteurs ait pu lui offrir l’occasion de croquer quelques figures intéressantes, ce dont il ne s’est pas privé. En revanche, le cirque s’est avéré, tout au long de sa vie, une source d’inspiration inépuisable. Même s’il n’avait pas manifesté un grand intérêt dans ses premiers contacts avec le chapiteau. Mais peu à peu, le cirque devient pour lui un théâtre du monde. Les mimiques des clowns rejoignent sa recherche de l’exacerbation des sentiments que ce soit dans la gaîté ou dans la tristesse. Et puis, les animaux du cirque lui donnent l’occasion de faire quelques dessins cocasses ou étranges. Mais il y a surtout les acrobates et les saltimbanques. Paul Klee voit dans leur travail une métaphore de la vie d’artiste. Particulièrement les funambules qui incarnent les incertitudes du statut d’artiste, leur courage et leurs espoirs de réussite, de même que les risques encourus et le danger d’une chute mortelle. Ce danger est presque toujours présent dansles dessins de Klee: le funambule hésite, on imagine la chute. L’équilibre, perçu comme un processus permettant de contrebalancer des forces opposées devient un leitmotiv de sa pensée créatrice. Enfin, il y a la danse. Cette forme d’expression fascine nombre d’artistes (parmi eux Kandinsky). La démarche de Klee consiste essentiellement à remplacer la représentation du mouvement par celle de l’espace: une nouvelle conception de la danse en tant qu’architecture en mouvement. Klee supprime les fioritures, l’ornementation (il n’aimait pas trop l’art nouveau): la danse devient une construction dans l’espace. On perçoit bien sûr, dans cette démarche, l’influence du Bauhaus de Walter Gropius, (notamment dans son approche de l’architecture contemporaine), véritable laboratoire des arts, où Klee enseigna pendant de longues années, et où il trouva de nombreuses sources d’inspiration, particulièrement dans les expérimentations théâtrales et dans les fêtes mémorables qui y étaient données.Le livre, dans une section chronologique richement illustrée, permet de suivre en parallèle la trajectoire de Paul Klee et celle des arts du spectacle moderne européen, de la musique à l’opéra, de l’architecture au théâtre qui l’enchantaient, bien que sa préférence aille tout de même au cirque. Peu de temps avant sa mort, il exprimait le désir, rappelle Rolf Bürgi son ami et conseiller: «de revoir une de ces toutes petites cavalières de cirque, telles qu’[ils avaient] pu parfois en admirer, avec ses tutus de ballerine et tout son attirail.» Rolf Bürgi put heureusement «[…] exaucer son vœu et Klee [l’] accompagne encore une fois au cirque Knie.»

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