En 1891, le peintre postimpressionniste Paul Signac (1863-1935) adresse à son ami Camille Pissarroune lettre de trois pages, signée de ses initiales entrelacées. Rédigée en style télégraphique, c’est une suite de petites nouvelles, concernant des personnes de leur entourage commun. On relève au passage le nom de Gustave Caillebotte, autre artiste reconnu.L’intérêt de cette lettre tient à la présence de trois vignettes, exécutées avec la même plume que les lignes d’écriture. Toutes trois représentent des marines qu’il faut situer en Bretagne, les ports de Lorient et de Douarnenez étant cités dans le document. Chaque dessin est accompagné de sa légende, disposée dans les marges.Dans le cas du premier dessin, intitulé Soleil couchant, on lit: «ciel jaune vert; rives; herbe brûlée». À propos du second, Calme du matin, il est écrit: «voiles multiples et multicolores; un gros rocher (second qualificatif illisible)». Quant au troisième dessin, dénommé Le paysage, Signac le décrit ainsi: «temps gris; vieilles murailles à mâchicoulis; des arbres audessus; un sardinier entre».Ces dessins, de quelques centimètres de côté, sont étonnants de concision. Tout y est, comme sur une toile de grand format : la profondeur jusqu’à l’horizon, le contraste entre les parties éclairées et les parties sombres, les reflets dans l’eau. On croirait entendre le cri des mouettes. Et l’odeur de marée monte aux narines…Le destinataire de la lettre, Camille Pissarro, admirait ces esquisses, puisqu’il les a soigneusement conservées et archivées.