INGO MAURER LE LUMINEUX MAGICIEN

La Festa della Farfalle, 2019
La Festa della Farfalle, 2019
Avec ses volutes de papier et ses papillons dansants révélés à Euroluce, biennale milanaise de l’éclairage, le célébrissime designer et producteur allemand ne cesse, à 87 ans, de confirmer son statut d’enchanteur de lumière. Du one-off à l’édition limitée, du surmesure à l’objet du quotidien, ses rubans de lumière proches du readymade, ses suspensions ailées, ses légers disques flottants, ses vagues dorées et ses éclats de porcelaine ont inscrit Ingo Maurer au panthéon des grands designers internationaux. Entre trait d’humour, joyeuse poésie, sensualité et viscérale élégance, le créateur a toujours choisi la liberté, à commencer par celle de l’autoédition. En insatiable curieux, il nous livre, à quatre-vingt-sept ans, les fruits de ces dernières inspirations. Révélés en avril dernier, lors de la folle semaine milanaise du design, OOP’Sala conçu pour trôner au-dessus d’une table ronde et OOP’S 2, comme épinglé au mur, sont venus rejoindre ses indéfectibles passions pour le papier, aussi enjôleuses que des grâces imprévues. Une nuée de papillons, une libellule, trois ampoules comme trois poires dans une assiette de porcelaine à LEDs, c’est aussi l’inattendu de La Festa delle Farfalle (la fête des papillons), réminiscence de « l’époque où les gens gardaient toujours une coupe de fruits ornementale sur la table, à laquelle nul ne touchait ». Des nouveautés techniquement parfaites et minutieusement fabriquées, comme autant de nouveaux hommages à la source lumineuse la plus simple. Showroom Ingo Maurer de FAS Iluminaçao, Sao Paulo, Brésil, ouvert en 2016 ; Porca Miseria, 1994-2016 ; Broken...

Avec ses volutes de papier et ses papillons dansants révélés à Euroluce, biennale milanaise de l’éclairage, le célébrissime designer et producteur allemand ne cesse, à 87 ans, de confirmer son statut d’enchanteur de lumière.

Du one-off à l’édition limitée, du surmesure à l’objet du quotidien, ses rubans de lumière proches du readymade, ses suspensions ailées, ses légers disques flottants, ses vagues dorées et ses éclats de porcelaine ont inscrit Ingo Maurer au panthéon des grands designers internationaux. Entre trait d’humour, joyeuse poésie, sensualité et viscérale élégance, le créateur a toujours choisi la liberté, à commencer par celle de l’autoédition. En insatiable curieux, il nous livre, à quatre-vingt-sept ans, les fruits de ces dernières inspirations. Révélés en avril dernier, lors de la folle semaine milanaise du design, OOP’Sala conçu pour trôner au-dessus d’une table ronde et OOP’S 2, comme épinglé au mur, sont venus rejoindre ses indéfectibles passions pour le papier, aussi enjôleuses que des grâces imprévues. Une nuée de papillons, une libellule, trois ampoules comme trois poires dans une assiette de porcelaine à LEDs, c’est aussi l’inattendu de La Festa delle Farfalle (la fête des papillons), réminiscence de « l’époque où les gens gardaient toujours une coupe de fruits ornementale sur la table, à laquelle nul ne touchait ». Des nouveautés techniquement parfaites et minutieusement fabriquées, comme autant de nouveaux hommages à la source lumineuse la plus simple.

Showroom Ingo Maurer de FAS Iluminaçao, Sao Paulo, Brésil, ouvert en 2016 ; Porca Miseria, 1994-2016 ; Broken Egg, 20082016 ; Golden Ribbon, 2006-2016 © Photo Andres Otero
OOP’S 2, 2019
OOP’S 2, 2019

AU COMMENCEMENT ÉTAIT L’AMPOULE Fasciné par la forme de l’ampoule qui éclairait la chambre d’une pension vénitienne un peu borgne, Ingo Maurer dessinera, en 1966, la célèbre lampe Bulb. Puis vint la lumière, cette « incroyable et versatile immatérielle matière » qu’il va explorer dans toutes ses intensités et ses jeux d’ombres et d’obscurité. Et qu’importe le sens convenu du bon goût. Inspirée par les explosions du film Zabriskie Point de Michelangelo Antonioni, sa Porca Miseria, effervescence d’assiettes de porcelaine savamment cassées, fut accueillie comme un acte de pure rébellion avant d’être considérée comme un bel objet très raffiné. « Avec les années, la conception du beau et du laid a changé », observe-t-il, tandis que sa singularité inventive n’a jamais déserté cet homme toujours aiguillonné par les rencontres, les modes de vie et la nature, celle qui lui court après avec ses reflets d’eau depuis sa naissance sur l’île de Reichenau du lac de Constance. Un bon équilibre avec l’attrait de la ville, New York en particulier où, jeune graphiste, il ira durant quelques années respirer les incitations au « tout possible ». Dans sa tête, il reste toujours l’ampoule, évidemment, l’appareil d’éclairage radical auquel il rend de multiples hommages, tels I Ricchi e Poveri danstoutes ses variantes, son hologramme Holonzki ou, l’an dernier, l’imprévisible Luzy, simple gant en caoutchouc bleu avec des ampoules à l’extrémité des doigts. Ce qui n’a pas empêché ce fou de technologie d’avoir, dès le tournant du siècle, développé l’œuvre expérimentale à LEDs Flying Future, équipant aussi de même manière de légendaires papiers peints, tables et bancs, ainsi que El.E.DEE, le tout premier luminaire de bureau du genre. Mais il utilise cette source lumineuse avec conscience, sachant que, « malgré les immenses progrès, ces diodes dont le rendu de couleurs est imparfait ne peuvent s’adapter à toutes les situations ». Après tout, la qualité de la lumière et son influence sur le bien-être des gens revêtent pour lui une importance primordiale.

Pendulum, 2019 Pinacothèque d’Art Moderne de Munich © Photo Stephan Görlich
Pendulum, 2019 Pinacothèque d’Art Moderne de Munich © Photo Stephan Görlich

L’ÉTERNEL IMPRÉVU « Certains de mes dessins semblent “impossibles”. Mon équipe me dit parfois : “Ingo, tu ne peux pas faire ça !”. J’écoute, j’aime que mes collaborateurs qui conçoivent parfois leurs propres projets, s’engagent à mes côtés. Nous sommes une petite entreprise, il n’y a pas de barrière, c’est facile de partager. Mais la plupart du temps, je suis mes intuitions. La YaYaHo (1984), il nous a fallu quatre ans pour développer ce système d’éclairage filaire à basse tension, l’un des premiers du genre. Nous avons eu du mal à obtenir un prêt bancaire, mais l’objet a rencontré un énorme succès et est toujours au catalogue. L’inspiration m’arrive comme un flash ou un oiseau qui me frôle et l’urgence de créer se fait alors intense. Je doute toujours, mais l’idée est plus forte que le doute».

« Je suis un homme de risques. L’argent a de l’importance seulement quand il permet d’avancer. La notion de profit n’est pas très bonne pour la qualité du design ni pour la liberté d’idées. Les créations viennent comme elles viennent, sans plan marketing qui mise sur les effets de mode et crée des “must have”. Je n’ai jamais eu envie de me plier aux lourdeurs d’un grand éditeur, ni faire des compromis ».

La Villa Médicis à Rome, Ron Arad, Issey Miyake, aujourd’hui Moroso, la très artistique société italienne de mobilier contemporain, sont autant de collaborations souvent liées à ce sens aigu de
la liberté. « Issey Miyake m’avait seulement dit : Surprenez-moi » ! Quant à son pavillon Broken Egg (2013), immense coquille d’œuf en béton fêlé qui accueille les visiteurs du parc brésilien Inhotim, il fait partie des rares œuvres d’Ingo Maurer qui n’émettent pas de la lumière, mais ont tout à voir avec elle. Tel Pendulum, l’ellipsoïde oscillant de la taille d’un homme créé pour la Pinacothèque d’Art Moderne de Munich. Inaugurée en mai, l’installation en place jusqu’en février 2020 est le prélude à une vaste exposition des œuvres du créateur. L’homme de l’éternel renouveau poursuit ainsi sa trajectoire tel qu’en lui-même, plus imprévisible et fascinant que jamais.

YaYaHo, 1984
YaYaHo, 1984

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