HEUREUX QUI, COMME DAVID…

La Royal Academy of Arts de Londres présente une exposition consacrée aux paysages de David Hockney. Couvrant 50 ans de création, elle propose plusieurs œuvres du peintre produites pour l’occasion, après son récent retour en Angleterre. Après avoir vécu 37 ans en Californie, David Hockney (Bradford, 1937) est revenu vivre en 2005 dans son Yorkshire natal. Titulaire du très sélect Ordre du mérite britannique, il peint aujourd’hui la nature qui l’entoure sur des compositions de très grand format, grillant cigarette sur cigarette aux côtés de John Fitzherbert, son compagnon de vingt ans, et de leurs deux turbulents Jack Russells, tous installés dans l’ancienne maison de la mère de David. Serait-ce là son idée de la retraite après la fièvre des années américaines ? Ne vous y fiez pas: Hockney est plus actif que jamais, et utilise toujours les techniques les plus modernes pour créer. Après avoir détourné en son temps les polaroïds, les photocopies, le fax ou plus récemment les techniques de la peinture digitale, c’est aujourd’hui avec l’iPhone et l’iPad qu’il crée bouquets et paysages. Ou encore des images à messages, pour pester sans relâche contre les lois anti-tabac… L’usage et la raison acquis au cours de ce long voyage lui auront, certes, servi à abandonner les impossibles combinaisons de complets rose vif à carreaux, cravate à gros pois et chaussettes dépareillées (l’une rouge, l’autre verte), comme on le voit sur une photo prise dans les années 1970 par Peter Schlesinger, son premier grand amour. Le voilà assagi peut-être...

La Royal Academy of Arts de Londres présente une exposition consacrée aux paysages de David Hockney. Couvrant 50 ans de création, elle propose plusieurs œuvres du peintre produites pour l’occasion, après son récent retour en Angleterre.

Après avoir vécu 37 ans en Californie, David Hockney (Bradford, 1937) est revenu vivre en 2005 dans son Yorkshire natal. Titulaire du très sélect Ordre du mérite britannique, il peint aujourd’hui la nature qui l’entoure sur des compositions de très grand format, grillant cigarette sur cigarette aux côtés de John Fitzherbert, son compagnon de vingt ans, et de leurs deux turbulents Jack Russells, tous installés dans l’ancienne maison de la mère de David. Serait-ce là son idée de la retraite après la fièvre des années américaines ? Ne vous y fiez pas: Hockney est plus actif que jamais, et utilise toujours les techniques les plus modernes pour créer. Après avoir détourné en son temps les polaroïds, les photocopies, le fax ou plus récemment les techniques de la peinture digitale, c’est aujourd’hui avec l’iPhone et l’iPad qu’il crée bouquets et paysages. Ou encore des images à messages, pour pester sans relâche contre les lois anti-tabac…

L’usage et la raison acquis au cours de ce long voyage lui auront, certes, servi à abandonner les impossibles combinaisons de complets rose vif à carreaux, cravate à gros pois et chaussettes dépareillées (l’une rouge, l’autre verte), comme on le voit sur une photo prise dans les années 1970 par Peter Schlesinger, son premier grand amour. Le voilà assagi peut-être aussi, après des années de nomadisme affectif dans cette Amérique si libre, qu’il connut pour la première fois à New York en 1961, puis surtout à Los Angeles, où il s’installa peu après pour y faire un grand tour de presque quatre décennies, captivé par le style de vie décontracté, le soleil, la plage et ses habitués. Le public retient d’ailleurs souvent à tort, de ces années, les seules peintures de garçons sous la douche, glissant sous l’eau brillante des piscines de Malibu, ou disparus sans autres traces que de grandes éclaboussures après le plongeon. On se souvient peut-être aussi un peu trop de ces intérieurs ultramodernes ou bourgeois chic et de leurs occupants, des collectionneuses d’art, des designers de mode comme Ossie Clark, des écrivains comme Christopher Isherwood ou des acteurs underground comme Divine. On revient aussi beaucoup sur son look de jeunesse, cheveux décolorés (parce que la publicité d’une marque de teinture prétendait que les blondes s’amusaient plus), lunettes rondes extra-larges à grosse monture noire, polo à rayures. N’avait-il pas aussi, à 26 ans, reçu un prix de la Reine Mère, affublé d’une veste en lamé doré ?

Mais au-delà du vernis mondain et rebelle, au-delà de la célébrité acquise avant même la fin de ses précoces études, des premiers sujets flirtant avec l’expressionnisme de Bacon ou certains canons warholiens, on devine néanmoins la lucidité d’un artiste qui, ayant toujours facilement connu le succès, a tenu à ne jamais s’affilier complètement au pop art ni à renier ses origines britanniques («Je viens de Bradford, personne ne pourra m’enlever ça !»). L’art du paysage, trait britannique s’il en est et qu’il explore déjà au cours de ses années au Royal College of Art de Londres, ne l’abandonnera donc jamais complètement, qu’il s’agisse de peindre dans les années 1960 et 1970 l’arrosage des pelouses de Beverly Hills, les paysages urbains de Santa Monica ou simplement une belle vue prise de la fenêtre d’une chambre (Ordinary Picture, 1964). Avec ces aplats de couleur lisse rappelant la photographie, et leur capacité à refléter la beauté d’un court instant capté pendant un voyage, on retrouve alors plutôt la calme sensibilité d’un Alex Katz, autre échappé du pop art. Depuis les années 1980, le paysage est encore plus clairement présent. Ce sont les collines que Hockney aperçoit depuis Mulholland Drive en allant à son studio, les vagues du Pacifique derrière les vitres d’une villa de Malibu où il prend le thé, ou les douces collines de Hollywood (Nichols Canyon, 1980). Il y exprime une liberté formelle et une exubérance coloriste où l’on croit voir surgir tour à tour Picasso, Matisse ou Miró. S’il se passionne alors pour les collages de polaroïd, ce n’est pas non plus pour se limiter aux portraits de ses amis ou de sa mère: là encore le paysage, décomposé en dizaines d’instantanés, trouve sa place (Pearblos som Highway, 11-18 April 1986 #1). Au cours des années 1990, et outre des paysages abstraits rappelant Tzara ou Dalí (What About The Caves, 1991; ou The Other Side, 1990-93), les images de routes sillonnant la campagne l’accompagnent toujours (The Road Across the Wolds, 1997). La rétrospective «Espace/Paysage» à Beaubourg en 1999 n’avait-elle pas d’ailleurs déjà souligné l’originalité des représentations non linéaires, dans les paysages de David Hockney ?

Rien de plus naturel donc, à son retour en Angleterre, que de poursuivre la quête paysagiste, qui rejoint d’ailleurs celle du portrait: «Tout comme les gens, les arbres sont des individus». La Royal Academy, dont il est membre depuis vingt ans, expose aujourd’hui les tableaux que sa campagne du Yorkshire lui a inspirés et les met en relation avec des dessins et des vidéos. Plus de 150 œuvres, dont beaucoup créées au cours des huit dernières années. En premier lieu, une surprenante série d’après Le Sermon sur la montagne du Lorrain, conservé à la Frick Collection. Ensuite, une série de vidéos projetées sur plusieurs écrans et captées par neuf caméras différentes: une double allusion, à la recherche qu’il mène de longue date sur les dispositifs optiques utilisés par les grands peintres depuis la Renaissance, pour rendre plus réalistes leur composition, et à son propre usage des plus récents outils informatiques. Enfin dans la plus vaste galerie, une œuvre immense de près de dix mètres de long, The Arrival of Spring in Woldgate, East Yorkshire in 2011 (twenty eleven), magnifique hommage à la nature, constitué par un puzzle de 32 tableaux, et entouré d’une cinquantaine d’impressions d’images créées sur iPad et retraçant les changements de saisons.

Hockney y surprend, comme toujours, par un usage très osé des couleurs: les mauves jouxtent les turquoises, les orangés… Un «Cézanne pop» pour certain, qui rappelle aussi Van Gogh (Winter Timber, 2009), dont il dit d’ailleurs «qu’il aurait adoré l’iPad». Une particularité liée à sa synesthésie, et qui se manifeste particulièrement dans ses magnifiques décors d’opéra, où il module les tonalités avec l’éclairage en fonction de la musique… Son exubérance est encore très prolifique: depuis l’apparition de l’iPad, il crée chaque jour de magnifiques images de «fleurs fraîches», exposées de puis dans les musées, mais qu’il offre surtout à ses amis. «Ils reçoivent ainsi des bouquets frais tous les jours. Et mes fleurs durent !».

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