AFFINITÉS COSMIQUES JEAN-BAPTISTE HUYNH – La galerie d’Artpassions

KENYA – Portrait 10 ECHOS – Tabouret à caryatide en forme de mère à l’enfant Luba et Songye, République démocratique du Congo, Musée Barbier-Mueller © 2024, Jean-Baptiste HUYNH
KENYA – Portrait 10 ECHOS – Tabouret à caryatide en forme de mère à l’enfant Luba et Songye, République démocratique du Congo, Musée Barbier-Mueller © 2024, Jean-Baptiste HUYNH
Né en France en 1966 d’un père vietnamien et d’une mère française, le photographe Jean-Baptiste Huynh pose sur les êtres et les objets le même regard teinté de respect et d’humilité. D’un extrême dépouillement et d’une rare élégance, son écriture est celle d’un sculpteur qui joue avec les ombres et les lumières, caresse le grain d’une peau, magnifie la courbe d’un sein, sublime un visage ovoïde aux allures de Madone… Invité à arpenter les réserves du Musée Barbier-Mueller pour tisser avec ses collections un rapport intime et sensoriel, JeanBaptiste Huynh y a exploré et redécouvert la beauté des origines. Idole cycladique à la taille étranglée et dont les seins sphériques ressemblent à de minuscules planètes, palette de fards égyptienne de la dynastie Nagada dont la forme, quasi abstraite, épouse les contours d’une carapace de tortue, tabouret à caryatide en forme de mère à l’enfant du peuple Luba, tambour en bronze de la culture dôngsonienne, ou bien encore cette flûtesifflet du Burkina Faso au design irréprochable…, tous ces objets ont subjugué le photographe par leur beauté muette. Or, par l’un de ces hasards heureux dont la vie a parfois le secret, c’est un masque Lega du Congo en forme de cœur, et dont l’arête du nez est esquissée par un simple sillon, qui a happé instantanément son regard. Recouverte de pigments blancs, cette face concave présentait en effet de mystérieuses affinités formelles avec un portrait d’enfant Suri au visage divisé par un maquillage bichrome que le photographe avait réalisé dans cette...

Né en France en 1966 d’un père vietnamien et d’une mère française, le photographe Jean-Baptiste Huynh pose sur les êtres et les objets le même regard teinté de respect et d’humilité. D’un extrême dépouillement et d’une rare élégance, son écriture est celle d’un sculpteur qui joue avec les ombres et les lumières, caresse le grain d’une peau, magnifie la courbe d’un sein, sublime un visage ovoïde aux allures de Madone…

Invité à arpenter les réserves du Musée Barbier-Mueller pour tisser avec ses collections un rapport intime et sensoriel, JeanBaptiste Huynh y a exploré et redécouvert la beauté des origines. Idole cycladique à la taille étranglée et dont les seins sphériques ressemblent à de minuscules planètes, palette de fards égyptienne de la dynastie Nagada dont la forme, quasi abstraite, épouse les contours d’une carapace de tortue, tabouret à caryatide en forme de mère à l’enfant du peuple Luba, tambour en bronze de la culture dôngsonienne, ou bien encore cette flûtesifflet du Burkina Faso au design irréprochable…, tous ces objets ont subjugué le photographe par leur beauté muette. Or, par l’un de ces hasards heureux dont la vie a parfois le secret, c’est un masque Lega du Congo en forme de cœur, et dont l’arête du nez est esquissée par un simple sillon, qui a happé instantanément son regard. Recouverte de pigments blancs, cette face concave présentait en effet de mystérieuses affinités formelles avec un portrait d’enfant Suri au visage divisé par un maquillage bichrome que le photographe avait réalisé dans cette contrée des origines qu’est la vallée de l’Omo, au sud de l’Éthiopie. Pendant ce confinement surréaliste qui a condamné au silence et à l’immobilité la planète tout entière, Jean-Baptiste Huynh a en effet vécu en osmose et en harmonie avec ces jeunes «dandys» parés de plumes et de fleurs, et dont la sophistication et l’élégance n’ont rien à envier aux plus majestueux des défilés de mode! De cette immersion dans une nature édénique, quasi intacte, est née une série baptisée FLOWER CHILDREN, qui marque un tournant significatif dans l’œuvre du photographe.

Est-ce le désir de renouer avec une humanité délestée de tout superflu qui taraude désormais Jean-Baptiste Huynh, qui a troqué son écriture ponctuée de noirs abyssaux pour une palette s’autorisant désormais le flamboiement des couleurs? Une certitude s’impose. L’heure était venue pour que survînt ce face-à-face entre le photographe et ces « condensés de beauté » rassemblés amoureusement depuis trois générations par la famille Barbier-Mueller. Il faut en effet se précipiter dans les salles intimes du musée genevois pour voir s’opérer le miracle. Il est des fils invisibles qui relient, par-delà les horizons géographiques et temporels, ces masques et ces « idoles» des temps lointains avec ces photographies magistrales qui ont parfois le caractère hiératique et sacré des icônes. «Au fil du temps et des pays, j’ai construit un kaléidoscope où figures et rites s’entrelacent, se tissent, se diluent, d’allégories secrètes en échos limpides », confesse Jean-Baptiste Huynh dans le petit catalogue qui accompagne l’exposition . Fortuites et poétiques, des correspondances secrètes se nouent ainsi entre une «idole sensuelle et l’arabesque d’une femme dénudée», entre cet «appui-tête tribal et un croissant de lune d’Orient », entre ce « sage centenaire et ce gardien végétal ». Mais c’est peut-être sur l’épiderme ridé de ces mains d’hommes et de femmes, aux veines tortueuses comme des racines d’arbres vénérables, que se devine toute la tendresse que Jean-Baptiste Huynh porte à ses modèles. « Aux confins des mondes, la beauté est un partage. Un dialogue des civilisations, un voyage au bout du regard», tels sont les mots inspirés de ce poète-photographe, pétri d’humanité.

FLOWER CHILDREN – Portrait 57 ECHOS – Plat, Égypte, début de l’époque dynastique, Ie-IIe dynasties thinites, vers 2900-2593 av. J.-C., marbre, d. 22 cm, Musée Barbier-Mueller © 2024, Jean-Baptiste HUYNH

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