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ALAIN DELON  PORTRAIT DUN ACTEUR EN COLLECTIONNEUR
ALAIN DELON  PORTRAIT DUN ACTEUR EN COLLECTIONNEUR
ALAIN DELON : PORTRAIT D’UN ACTEUR EN COLLECTIONNEUR Tout aura été dit sur le génie d’Alain Delon devant une caméra. Artpassions rend hommage à une facette moins connue du comédien légendaire, disparu le 18 août dernier. À plusieurs reprises Delon aura interprété des collectionneurs: dans L’Homme Pressé, il court après un vase étrusque jusqu’à en crever. Quant au marchand d’art Monsieur Klein, il spolie « gentiment» des juifs forcés de vendre leurs tableaux pendant la guerre. Si ces films datent de la fin des années soixante-dix, la collectionnite de l’acteur fut précoce. Dès ses premiers succès en 1960, Delon pénètre en autodidacte dans les salles des ventes, qu’il ne quittera plus. Objet universel de désir, la star fixe le sien, de désir, sur les œuvres d’art. «Je peux traverser le monde pour une pièce», affirme le jeune premier, qui hante les musées et réunit, entre deux tournages de Visconti ou de Melville – à rebours de la vogue warholienne du Pop art – une collection inouïe d’esquisses arrachées au passé: Pontormo, Véronèse, Rubens, Rembrandt, Degas. L’exalté ne se contente pas d’acheter. Il lit toutes les biographies, note: «Le dessin, c’est le premier jet, la première pensée de l’artiste.» Côté peinture, son goût le conduit à Delacroix, Millet, Corot, Dufy – et le mène pour le XXe vers les univers formalistes de Braque, de Dubuffet, du néerlandais Karel Appel, ou du canadien Jean-Paul Riopelle. Les murs de ses propriétés de Paris, Douchy et Genève ne sont plus assez nombreux pour tout accrocher....

ALAIN DELON : PORTRAIT D’UN ACTEUR EN COLLECTIONNEUR

Tout aura été dit sur le génie d’Alain Delon devant une caméra. Artpassions rend hommage à une facette moins connue du comédien légendaire, disparu le 18 août dernier. À plusieurs reprises Delon aura interprété des collectionneurs: dans L’Homme Pressé, il court après un vase étrusque jusqu’à en crever. Quant au marchand d’art Monsieur Klein, il spolie « gentiment» des juifs forcés de vendre leurs tableaux pendant la guerre. Si ces films datent de la fin des années soixante-dix, la collectionnite de l’acteur fut précoce. Dès ses premiers succès en 1960, Delon pénètre en autodidacte dans les salles des ventes, qu’il ne quittera plus. Objet universel de désir, la star fixe le sien, de désir, sur les œuvres d’art. «Je peux traverser le monde pour une pièce», affirme le jeune premier, qui hante les musées et réunit, entre deux tournages de Visconti ou de Melville – à rebours de la vogue warholienne du Pop art – une collection inouïe d’esquisses arrachées au passé: Pontormo, Véronèse, Rubens, Rembrandt, Degas. L’exalté ne se contente pas d’acheter. Il lit toutes les biographies, note: «Le dessin, c’est le premier jet, la première pensée de l’artiste.» Côté peinture, son goût le conduit à Delacroix, Millet, Corot, Dufy – et le mène pour le XXe vers les univers formalistes de Braque, de Dubuffet, du néerlandais Karel Appel, ou du canadien Jean-Paul Riopelle. Les murs de ses propriétés de Paris, Douchy et Genève ne sont plus assez nombreux pour tout accrocher. Maître dans l’art de la provocation, Delon réplique, lorsqu’on l’interroge sur ces trophées: «Il y en a qui s’achètent des voitures, d’autres qui vont aux putes, moi je préfère les tableaux.» Toute collection, dit-on, révèle son collectionneur. Un tropisme se dégage des choix de l’acteur: du Scarabée des bois de Dürer (Delon fut l’un des derniers acquéreurs privés d’une œuvre du graveur allemand) au Cheval arabe attaché à un piquet de Delacroix, sans oublier Deux hommes nus s’efforçant d’arrêter un taureau de Géricault, la représentation animalière lui tint fort à cœur. À l’instar de Bardot, la pureté des bêtes consola-t-elle la vedette de la folie humaine? Outre ses chiens, l’interprète du Guépard s’entoura en effet d’une autre meute: les lions, panthères, ours et éléphants taillés par Georges-Lucien Guyot, et surtout Rembrandt Bugatti. Au sujet de ce dernier, suicidé à trente et un ans, l’icône qui avait débuté sa vie comme apprenti charcutier – et était passé du lard à l’art –, avouait: «Comme pour Géricault, il y a dans mon attrait pour Bugatti, solitaire au destin tragique, une certaine analogie avec ce que j’ai fait et d’où je suis parti.» Les grands destins font de bons scénarios.

CAILLEBOTTE À L’HONNEUR

Une grande exposition au musée d’Orsay sur un des sujets favoris de l’artiste. Pour le cent trentième anniversaire de sa mort (1848-1894), cette rétrospective inédite mettra en lumière les figures masculines et les portraits d’hommes. Soixante-dix œuvres seront réunies dont les plus importants tableaux de figures mais aussi des pastels, des dessins, des photographies et des documents d’archives. Des tableaux qui questionnent l’ordre social et sexuel à l’époque du triomphe de la virilité et de la fraternité républicaine. Une première crise de la masculinité traditionnelle… Au-delà de sa propre identité, celle du jeune et riche célibataire parisien, Caillebotte porte au cœur de l’impressionnisme et de la modernité, une profonde interrogation sur la condition masculine. L’artiste prend pour modèles les hommes de son entourage comme ses frères, les ouvriers qui travaillent pour sa famille ou des amis. Un regard différent et nouveau de l’histoire de l’art sur les masculinités du XIXe siècle.

Caillebotte. Peindre les hommes, musée d’Orsay, Paris du 8 octobre 2024 au 19 janvier 2025.

TORLONIA , RÊVES DE PIERRE…

Le Louvre accueille une extraordinaire collection privée de sculptures antiques, jamais présentées depuis des décennies. Les plus belles œuvres de la collection Torlonia s’installent hors d’Italie et vont dialoguer, dans les salons d’été restaurés d’Anne d’Autriche, avec leurs homologues disposés au Louvre depuis sa création. Une rencontre franco-italienne qui permet d’explorer les sources de l’art occidental et sa fascination pour l’antiquité. Cette collection fut commencée au XIXe siècle par les princes Torlonia dans le but de rivaliser avec celles du Vatican et même du Louvre. Ces trésors révèlent le goût exquis de cette collection princière romaine jamais montrée au public depuis la fermeture du palais de Rome, transformé en appartement privé. Ces merveilles auraient pu disparaître: tentative de vente, rachat avorté, intermédiaire douteux… C’est la maison Bulgari qui a rendu possible cette exposition grâce à son mécénat. Un patrimoine historique qui n’a cessé de quêter la perfection… À ne pas manquer!

Chefs-d’œuvre de la collection Torlonia, musée du Louvre, Paris jusqu’au 11 novembre 2024.

FIGURATION NOIRE À BÂLE

Cent cinquante peintres, cent vingt artistes sont réunis autour de «When We See Us», clin d’œil à la mini-série Netflix «When they see us». En remplaçant le «They » par «We», l’exposition opère un changement de perspective. Comment les artistes issus d’un siècle de peinture figurative noire voient-ils leur condition? Souvent la vie des «Noirs» a été décrite de manière biaisée et erronée… Ici, au lieu de s’intéresser au colonialisme et à ses traumas, on couvre le «Black Joy » (la «puissance de la joie»). L’ensemble se déploie à travers six sections et des thèmes universels. Un must à voir et en parallèle avec de nombreuses activités culturelles! Une nouvelle histoire de l’art, inclusive et inspirante…

When We See Us – Un siècle de peinture figurative panafricaine, Kunstmuseum, Bâle jusqu’au 27 octobre 2024.

UNE INFINIE DÉLICATESSE

L’artiste plasticienne belge née en 1960, poursuit ses recherches sur l’usure de la matière, le temps qui passe, le soin accordé aux moindres choses. Rideaux, pierres, drapés se jouent de la lumière du Sud, de l’intangible. L’artiste tisse des liens entre les technologies nouvelles et évolutives, les savoirs ancestraux et les enjeux contemporains. Certaines œuvres défient la décomposition de la matière permettant d’esquisser une atmosphère particulière entre brutalité et fragilité, d’où la présence de ces notions antagonistes dans un même lieu. Edith Dekyndt nous invite à explorer de multiples niveaux de signification et à remettre en question notre compréhension de l’espace, de la mémoire et de la temporalité. Elle s’éloigne d’un minimalisme hermétique, elle interpelle et évoque des «sujets» plutôt que des « objets». Elle déconstruit les signes de son processus créatif. Elle archive, collecte et catalogue des images, des sons, des objets avec une méthodologie rigoureuse. Sa démarche souligne l’urgence de questionner l’écriture et les récits historiques, dans une perspective critique, pour saisir la réalité sociale et politique. Son travail s’appuie sur l’impermanence en évoquant l’empreinte laissée par l’histoire à la surface des choses, de l’architecture et des espaces publics. À découvrir dans un cadre superbe!

Edith Dekyndt, Specific Subjects, Fondation CAB, Saint-Paul-de-Vence, France jusqu’au 27 octobre 2024.

COMMENT LES ŒUVRES HYPNOTISENT

Cette exposition pose l’hypnose comme un sujet d’étude de l’histoire de l’art moderne et contemporain. Le théoricien Pascal Rousseau s’est fait expert en occultisme en analysant sous ce biais l’histoire des avant-gardes. Aidé par le directeur du MAH, amateur d’irrationnel aussi… ils sont partis sur les traces de Waldemer Deonna (archéologue qui dirigea l’institution de 1922 à 1951), lui-même passionné par ces questions. Sous ce prétexte, ils se sont interrogés sur la capacité des œuvres à captiver l’attention du public et à le transporter par leur «propriété fluidique». Les œuvres forment ici une « chaîne magnétique» dans laquelle l’œil va faire l’expérience de modes décalés de connaissance. Avec la complicité de l’artiste Tony Oursler, pionnier de la sculpture-vidéo, le parcours propose l’histoire des imaginaires visuels de l’hypnotisme à travers des installations multimédia. C’est le mystère du pouvoir des objets en provenance d’époque et de destinations différentes… On redécouvre la collection du musée sous un nouvel éclairage entre imaginaire et expérimentations scientifiques… Une expérience étonnante!

Archéologie des fluides, MAH, Genève jusqu’au 27 octobre 2024.

EXPOSITION FÉMININE À LA CHAUX-DE-FONDS

Anna Mendieta (1948-1985), artiste américaine à la carrière imposante, a recherché ses racines. Maria Tackmann(1982), artiste suisse, redessine la Chaux-de Fonds à l’aide d’objets collectés. Trace et territoire sont les thèmes de cette nouvelle exposition. Anna Mendieta a produit une œuvre qui a particulièrement influencé l’art d’aujourd’hui. Née à Cuba, elle a travaillé aux États-Unis, a accompagné les avant-gardes de son temps en les menant dans des directions plus complexes et plus sensibles. Elle intègre son corps dans des environnements naturels. Un art de la fusion et du souvenir. Souvenirs des traditions ancestrales, tout est chargé de symboles comme un appel aux divinités de la Nature. Maria Teckmann reflète un parcours organique et personnel de l’environnement urbain, essence de liberté et de simplicité. Ces objets collectés, elle les agence sur le sol pour trouver une harmonie entre les formes et les matériaux. Elle dessine également et crée des œuvres en mêlant brindilles et verre: «les lignes de désir» pour privilégier l’itinéraire le plus court au lieu de voies aménagées. Toutes deux, pionnières de l’écoféminisme, laissent leur trace… l’une avec la volonté de ne faire qu’un avec la nature, l’autre en jouant avec les objets, dans un rapport sensible à leur environnement. Une exposition en rapport avec les questionnements écologiques actuels…

Maria Tackmann. Lignes de désir. Ana Mendieta. Aux commencements, musée des Beaux-Arts de la Chaux-de-Fonds, Suisse jusqu’au 27 octobre 2024.

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