Par ses photographies, l’artiste nous propose une réflexion sur la condition humaine et un divertissement visuel. Sa pratique n’a que dix ans mais il jouit déjà d’une reconnaissance importante dans le domaine de l’art contemporain.
Après une vie de commerçant, Gilbert Garcin, en poète, a éprouvé l’envie de «jouer» avec objets et figurines pour projeter nos phantasmes, nosespoirs et nos déconvenues. Il se livre à un véritable brassage d’idées. Par ce jeu des situations, il dit la grandeur et les petits travers de l’aventure humaine. À partir d’images universelles, nous construisons une narration personnelle. Ainsi, nous renouons avec notre passé et nous nous projetons dans l’avenir incertain.Gilbert Garcin part d’une idée qu’il nous révèle par l’agencement d’objets et de matières et par la mise en scène de sa propre silhouette qu’il accompagne, parfois, de celle de sa complice et épouse Monique. Mais ces personnages sont intemporels; si nous les adoptons, c’est qu’ils nous servent de guides dans un voyage philosophique. Le héros ainsi découpé prend place, tel un acteur, sur la table de tournage. Les deux projecteurs allumés, la séance peut commencer. Alors, il photographie et se promène dans le champ de ses pensées, manipulant les objets-symboles. La magie opère. Exigeant sur le fond et la forme, le photographe ne garde qu’une seule image. Une fois l’idée révélée au regard des autres, l’œuvre est née. La silhouette qui nous représente devient tour à tour observateur, acteur, victime ou maître du monde se confrontant au temps et aux choses.
Il y a du théâtre dans cette démarche et du montage dans le procédé. Parfois, l’image en noir et blanc laisse apparaître à l’œil de l’expert un découpage ou un collage «certificats d’authenticité» car tout est photographié dans les scènes que Gilbert Garcin construit. C’est pourquoi nous yvoyons de vraies ombres portées, expression du réel de la composition, affirmation de la vérité de la scène. Rien n’est retouché, ni truqué; chez ce maître de l’illusion, l’ordinateur n’a pas sa place. C’est ainsi qu’il affirme sa singularité dans l’art de la photographie.En épinglant notre humanité, l’autodidacte motivé par quelques stages et rencontres d’Arles, fait écho à d’autres artistes: peintres, photographes et cinéastes. Ouvrons le catalogue des images pour y découvrir d’heureux cousinages avec André Vigneau, Horst P. Horst, Man Ray, Max Ernst, Caspar David Friedrich, André Breton, Magritte, Jacques Tati, Georges Méliès, Chaplin, et Hitchcock. Certains y verront une synthèse, d’autres un hommage aux maîtres du surréalisme, du suspens, du mystère et souvent de l’humour. Il tend les fils de ses intrigues visuelles et nous prend dans ses filets. Mais peu importe l’analyse, laissons-nous surprendre !Gilbert Garcin ne porte aucun jugement sur ses contemporains. Il nous donne à voir, à réfléchir et à nous divertir. Ses images sont plus que des photographies: de véritables tableaux, des images d’Épinal. Le but ultime de sa pratique, confie-t-il, est la rencontre et l’échange. Les expositions de ses œuvres sont permanentes aux quatre coins du monde. Les collectionneurs se les disputent.À l’âge où certains préfèrent la retraite, Gilbert Garcin s’amuse infatigablement de nos travers et de nos inquiétudes. Éveilleur de conscience, jongleur d’idées et amuseur spirituel, il se joue de nous et joue avec nous. Ainsi, nous sommes pris au «je» du maître de l’illusion.