Hannah Höch Dada’s not dead

Remontant légèrement dans le temps après la belle exposition consacrée à Max Ernst, le musée Tinguely part à la recherche de ce qu’on pourrait appeler les «sources du nihil», avec la figure d’Hannah Höch, artiste Dada et seule femme du groupe Dada-Berlin.Les amateurs et les contempteurs de l’art contemporain peuvent, les uns remercier Dada, les autres le maudire, car c’est Dada qui fait rageusement, joyeusement, anarchiquement voler en éclats les cadres formels et théoriques, que les Impressionnistes, les Fauves et le grand Cézanne avaient patiemment élargis.D’aucuns invoqueront l’abstraction ou le cubisme aux sources de la modernité, ce que nul ne contestera, il n’en reste pas moins que Dada, dont la postérité formelle reste assez pauvre, ou en tout cas non-exclusive, a procédé par son dynamitage théorique à une ouverture extrême du champ des possibles en art, en proclamant la primauté absolue de l’artiste et sa totale liberté. La conséquence directe est bien sûr cette foisonnante complexité de l’art du XXe siècle, à la fois hétérogène et redondant, et toujours déroutant.Née en 1889 à Gotha dans le centre de l’Allemagne, Hanna Höch – c’est, semble-t-il, le dadaïste berlinois Kurt Schwitters qui lui suggéra d’ajouter le second «h» à la fin de son prénom, afin d’en faire un palindrome – est issue d’un milieu provincial et bourgeois. C’est à Berlin en 1915, dans le cadre de la classe d’Emil Orlik, qu’elle rencontre l’artiste dada Raoul Hausmann, déjà marié et père d’une fille, avec qui elle aura une liaison tourmentée pendant plus de...

Remontant légèrement dans le temps après la belle exposition consacrée à Max Ernst, le musée Tinguely part à la recherche de ce qu’on pourrait appeler les «sources du nihil», avec la figure d’Hannah Höch, artiste Dada et seule femme du groupe Dada-Berlin.
Les amateurs et les contempteurs de l’art contemporain peuvent, les uns remercier Dada, les autres le maudire, car c’est Dada qui fait rageusement, joyeusement, anarchiquement voler en éclats les cadres formels et théoriques, que les Impressionnistes, les Fauves et le grand Cézanne avaient patiemment élargis.D’aucuns invoqueront l’abstraction ou le cubisme aux sources de la modernité, ce que nul ne contestera, il n’en reste pas moins que Dada, dont la postérité formelle reste assez pauvre, ou en tout cas non-exclusive, a procédé par son dynamitage théorique à une ouverture extrême du champ des possibles en art, en proclamant la primauté absolue de l’artiste et sa totale liberté. La conséquence directe est bien sûr cette foisonnante complexité de l’art du XXe siècle, à la fois hétérogène et redondant, et toujours déroutant.Née en 1889 à Gotha dans le centre de l’Allemagne, Hanna Höch – c’est, semble-t-il, le dadaïste berlinois Kurt Schwitters qui lui suggéra d’ajouter le second «h» à la fin de son prénom, afin d’en faire un palindrome – est issue d’un milieu provincial et bourgeois. C’est à Berlin en 1915, dans le cadre de la classe d’Emil Orlik, qu’elle rencontre l’artiste dada Raoul Hausmann, déjà marié et père d’une fille, avec qui elle aura une liaison tourmentée pendant plus de 10 ans, jusqu’à sa rencontre avec l’écrivain hollandaise Til Brugman en 1926.

Malgré la liberté totale et le bouleversement de toute valeur revendiqués avec force par les dadaïstes, Hannah Höch devra parfois batailler pour s’imposer en tant qu’artiste: Hausmann, qui refuse de quitter sa femme, attribue non sans suffisance les difficultés de leur relation à l’éducation «patriarcale-autoritaire» de Höch, Johannes Baader la surnomme avec une certaine ironie «Die Dadasophe» (puisqu’elle est la compagne de Hausmann, «Der Dadasophe») et tant George Grosz que John Heartfield ne verront pas sans réticence Höch participer à la première foire internationale Dada, en 1920, où elle présente ses Dada-Puppen et le collage Dada-Rundschau.En effet, c’est à Hannah Höch et Raoul Hausmann que l’on attribue en général l’introduction du photomontage comme moyen d’expression artistique chez les dadaïstes, sans d’ailleurs que leurs souvenirs respectifs ne concordent exactement à ce sujet. Les techniques de collages avaient déjà été expérimentées par les cubistes Braque et Picasso, dans le cadre de leurs recherches formelles, et par les Futuristes italiens, et seront largement utilisées par les Surréalistes; mais les artistes allemands de Dada vont en faire une utilisation très littérale, souvent politique, aussi éloignée de la métaphysique picturale cubiste que de l’onirisme poétique d’un Max Ernst.

Les bouleversements politiques et sociaux du début du siècle, les traumatismes particuliers de l’Allemagne (défaite de 1918, chaotique république de Weimar, montée de l’extrémisme national-socialiste) sont la matière principale des collages et travaux de Höch, même si nombres d’entre eux sont également des sortes de transcription de sa vie personnelle. Ainsi le voyage à pied de Berlin à Rome, qu’elle entreprend dans l’automne 1920 se retrouve dans Roma, une huile sur toile datée de 1925, qui rappelle fortement, tout en s’en détachant dans sa composition – elle est construite, littéralement, comme un collage – la peinture métaphysique de Giorgio De Chirico.La période troublée du IIIe Reich, Höch la passe en Allemagne, à Berlin. Si ses œuvres n’échappent pas à la propagande artistique nazie – elle figure dans le Säuberung des Kunsttempels (Nettoyage du temple de l’art) du SS Wolfgang Willrich publié à l’automne 1937, et ses œuvres sont également montrées à Munich la même année dans la seconde exposition d’art dégénéré – Entartete Kunst – organisée par les nazis. Malade, Hannah se terre dans une petite maison du quartier de BerlinHeiligensee, où elle continue à travailler en secret. Die Spötter, (Les moqueurs) une huile sur toile de 1935, traduit parfaitement le climat délétère de l’époque, avec sa foule de personnages grimaçants et vociférant, moquant un personnage solitaire, absorbé dans ses pensées face à ce que Baudelaire appelait déjà les gouffres amers.À la sortie de la guerre, Hannah Höch fut considérée comme une survivante et un témoin important des débuts de l’art moderne en Allemagne, ce qui contribua quelque peu à la figer dans un passé désormais révolu. Pourtant Höch continua à créer jusqu’à sa mort – l’une des rares artistes Dada à le faire, restant globalement fidèle au procédé du collage,auquel l’apport de la photographie couleurs et sa propre évolution artistique devaient donner de nouvelles tonalités (Kleine Sonne/ Petit soleil).L’exposition, réalisée en collaboration avec la Berlinische Galerie dépositaire des archives Höch, divisée chronologiquement en cinq sections, s’ouvre avec un grand collage autobiographique, réalisé par Hannah Höch au début des années 1970. La dernière section présente quant à elle un thème cher à l’artiste, celui des plantes et du jardin.

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