Il a révolutionné la mode dès les années soixante-dix. Habillé toutes les stars. Et imposé un style à nul autre pareil – en toute simplicité. L’un des créateurs les plus inclassables de notre époque se confie aux lecteurs d’Artpassions, à l’occasion de sa grande rétrospective aux Abattoirs à Toulouse.
Votre exposition, « L’Imagination au pouvoir », commence le 12 décembre. Juste avant Noël.
Oui : c’est un cadeau !
Quelle place occupait Noël pour l’enfant que vous étiez ?
Ce n’est pas compliqué, je n’ai souvenir d’aucun Noël. Ils sont inexistants.
Même pas de sapins étincelants, qui auraient influencé le designer à venir ?
Les fêtes n’existent pas dans ma mémoire, puisque j’ai passé toute ma jeunesse en pension.
Ça vous a manqué ?
Oui – et à la fois, ma vie d’artiste a été un rendez-vous avec ces choses imaginées sans pouvoir les vivre. Enfant, j’ai dû tout fantasmer dans ma tête. Même la tendresse. Parce que c’était un monde de discipline rude. De solitude.
Freud dit qu’une vie accomplie, c’est réaliser avec des moyens d’adulte ses rêves d’enfant.
J’aime cette idée. Ça se ressent dans mon travail, je pense, dans mes installations, mes couleurs. Ce chemin vers l’enfance qui constitue la grande boucle de la vie. Un retour à la case départ.
Vous n’attendez pas d’être adulte pour enjoli-ver l’enfance…
C’est vrai. Dès la pension, avec mes moyens, je crée de l’émerveillement. Du jeu. Mais les jouets que je fabrique servent toujours à quelque chose : à attraper des poissons, à faire un moulin avec des bâtons de bois, à transformer du fil de fer en pe-tite cage…
Cette idée de « transformation » va s’avérer cru-ciale dans votre pratique.
Oui, mais toujours à partir de la matière. Ou de l’objet utilisé comme matière. Les ours en peluche que je n’ai pas eus enfant, plus tard, je les ai cousus ensemble pour faire des manteaux.
La thématique de l’enfance renouvelée, c’est très présent, dans le monde de Picasso.
Je me retrouve davantage en Matisse qui, à par-tir de soixante-quatorze ans se met à faire… des découpages !
Que retenez-vous, avant tout, de Matisse ?
La pureté, la puissance infinie de son trait, qui me font penser à ce mot d’Hokusai : « Quand j’aurai cent dix ans, je tracerai une ligne et ce sera la vie. »
Et pourquoi aimez-vous tant sa période de découpages ?
Parce que c’est comme l’éradication de ce trait par les ciseaux. Il dessine alors avec l’invisible.
Depuis quelques années, vous réalisez vous-même de nombreux découpages…
Cela a été une épiphanie : j’ai mis en marche ma main droite, inusitée jusqu’alors, étant gaucher. Je me suis aperçu que cette main possédait une autre vérité, une fragilité perdue de l’autre côté.
Il y a beaucoup de points communs entre l’art et la fragilité.
J’ai compris ça, jeune homme, en observant la beauté de la « maladresse » de Robert Combas. Ou de Rémi Blanchard, ces deux grands de la figura-tion libre… Les anges que je dessine à la craie sur les murs de Paris ont quelque chose à voir avec cette révélation.
La craie, par excellence, est une matière asso-ciée à l’enfance. On a dû vous le dire mille fois !
Non, et je ne l’avais même pas relevé, en fait…
Le tableau d’ardoise, la marelle !
C’est vrai. Mais je ne l’ai jamais envisagé comme un geste de l’enfance. Je vois plutôt ces dessins comme une filiation avec mon ami Keith Haring, qui avait cette façon d’envahir le monde urbain avec une chose éphémère. D’ailleurs, quand j’ai commencé à tracer ces anges, c’était au fusain. Sauf qu’après la pluie, ils pleuraient des larmes noires ! Donc je suis passé à la craie.
Keith Haring avait ce rapport fantastique au symbole…
On a l’impression que ce qui sort de sa main se trace tout seul… Mais ce que je garde de lui, c’est son empathie. À cause de l’isolement de mon en-fance, j’avais ce besoin énorme de communiquer. Et le symbole, c’est un langage universel. Mais Matisse aussi était dans cette quête.
Autre maître du symbole : Basquiat. J’imagine que vous l’avez connu.
Il a même peint mon portrait, à moto. Je l’avais à la maison, mais je l’ai vendu il y a longtemps…
Vous avez eu tort.
J’ai eu tort sur plein de choses. À l’époque il fallait que je refinance ma société. C’est la vie !
Je reviens à votre biographie. Votre père meurt quand vous avez quinze ans. Vous l’aurez peu connu.
Peu vu, peu connu. Il était resté longtemps à Casablanca où je suis né. À partir du moment où j’ai été mis en pension, il est peut-être venu me voir quatre fois ? Mais je vais vous raconter une belle histoire. Un jour, je lui écris une lettre et lui avoue que j’ai menti. J’ai dit à mes camarades que mon père roulait en Jaguar. Donc, je lui demande : quand vous viendrez me voir, s’il vous plaît, pre-nez le train, n’arrivez pas avec votre deux-che-vaux… Et il débarque, à ma grande surprise, dans une Jaguar verte. Tous les gosses se sont penchés à la fenêtre. J’ai appris, après sa mort, qu’il avait vendu sa voiture pour pouvoir la louer – parce qu’il n’avait plus rien. Pour m’éviter de passer pour un menteur. C’est une histoire bouleversante.
Quel était son métier ?
Il était ingénieur textile. Mais un peu dilettante, poète, passionné de piano…
Une ascendance significative !
C’est vrai… mais ma grand-mère Marguerite était aussi l’héritière d’une longue lignée de tisseurs de coton, à Bolbec. Donc il y a quelque chose de lo-gique : j’ai cette trame en moi. Et lorsque mon père est mort, ma mère – qui était modéliste – a pris le lead.
C’est là qu’elle vient s’installer en Limousin.
C’est ça. Elle avait une maison de campagne à côté de Limoges, et quand je sortais de pension, je re-trouvais un monde très rural. Avec une présence très forte de l’ésotérisme.
Les rebouteux, les coupe-feu… ?
Des sorciers ! C’était une tradition dans la région. Comme il n’y avait pas véritablement de défense au Moyen Âge, on invoquait le diable pour se pro-téger. Chose étrange : ma première relation avec l’art contemporain, ce fut face aux objets que fa-briquaient ces ensorceleurs…
Qui étaient des sortes d’objets d’art brut ?
C’est ça. Je me souviens que ma mère avait un ami exorciste. Il a ouvert devant moi une boîte en mé-tal, avec au centre, un œuf attaché façon shibari, et des pierres de silex à quatre directions, sur un ta-pis de foin. Le questionnement d’un petit garçon devant cette chose !
Votre mère avait un côté extravagant. Vous l’aimiez ?
Ah ça oui, je l’aimais. Mais je ne le lui ai jamais dit. Ou très tardivement. Je vouvoyais mes pa-rents, le mot « amour », on ne le prononçait pas. Ça n’empêche qu’elle a été un exemple fondateur.
À vingt ans, cette mère vous confie les rênes de son atelier de couture, et vous répondez : « Je ne ferai pas de mode. » D’habitude c’est le contraire ! Les parents qui exigent : fais ton droit !
[Rires.] Il y avait dans ma famille une longue li-gnée militaire. Moi, j’étais fasciné par les cheva-liers, par Duguesclin, par ces héros de l’ombre bar-dés de galons. C’est l’armée qui m’attirait.
Il y a une dimension de mode dans le monde militaire.
Naturellement. Les uniformes m’ont beaucoup influencé. Ça me parlait davantage que la mode, qui restait à mes yeux trop décorative, ornemen-tale. Elle n’était pas « vivante ». Après ces années de pension, j’aimais tout ce qui était brut. J’avais be-soin de radicalité. De rudesse, même.
C’est à ce moment-là que vous transformez votre couverture de pension… en veste ?
Oui, c’est la période où se confirme mon obsession pour la matière. Je prends des matériaux bruts, des pièces du passé, et j’en fais des objets de mode.
On appelle ça la sublimation.
Une forme de sublimation, en effet. Appliqué à la mode on dira plus tard : l’upcycling.
Où trouviez-vous les matériaux de votre palette ?
J’avais un territoire de prédilection : les bazars. À Limoges, il y avait des stocks d’habits de travail, très archaïques. Vestes en tricotine, ceintures de flanelle paysannes, rubans tressés, boutons de por-celaine… Quelle poésie. Gabrielle Chanel aussi s’était appuyée sur ce corpus.
Ce « corpus » impose de faire avec l’existant. On ne part pas d’une page blanche…
C’est ça. Quand on travaille à partir d’une blouse de boucher, d’un drap militaire, la matière vous emmène sur un chemin. Pour moi c’était si puis-sant, si antinomique par rapport à tout ce qui se créait – qui était chargé de volants, de poignées inutiles… Et un habit qui a déjà été porté ren-ferme un fragment d’histoire : il est habité…
Vous employez aussi des matières brutes, même pas destinées à l’habillement !
Encore plus jouissif. Je crée des robes en éta-mine ; ce tissu qui sert à égoutter le fromage. Ou en bandes Velpeau. Parce que ces bandages sont avant tout un tissu. Et je me dit : c’est la plus belle matière, c’est en relation avec la peau… Il y avait une vérité dans ces matières.
Le succès est fulgurant. La presse de mode vous sacre chevalier de « l’anti-mode ».
C’est la définition qu’on m’a immédiatement don-née… Et ça m’allait bien, car je ne me sentais pas appartenir au monde de la Mode avec un grand M. Je considérais que les vêtements devaient être porteurs d’une intemporalité, en privilégiant le style. Soit ce qui ne se démode pas.
Vous utilisez même des serpillères… On songe à la scène culte du Père Noël est une ordure, où Anémone offre un gilet à Thierry Lhermitte… qui pense que c’est un chiffon !
Je ne me rappelais pas cette scène, mais ça doit être inspiré de moi, oui, puisque je fréquentais à l’époque Jean-Marie Poiré, qui était chanteur dans un groupe que j’habillais : The Frenchies. Une autre scène découle de mes créations, où Lhermitte s’allonge sur un canapé du même mo-tif que son costume. Je créais pas mal de pièces au-tour de la notion de mimétisme, de disparition…
Vous dites : « Ma préoccupation, quand j’étais jeune homme, c’était de protéger les femmes. »
Oui. Je crois que c’était un truc chevaleresque, un truc d’ange gardien.
Mais les protéger de quoi ?
[L’artiste cogite…] Du regard, des agressions ? Je créais des habitacles, en fait. J’avais un problème avec la construction. Presque tous mes vête-ments étaient informes. Ou cruciformes. Ça rime avec uniformes ! Un héritage de mon éducation : quelque chose d’à la fois chevaleresque, et litur-gique. Mais il y avait déjà cette obsession du rec-tangle, qui m’est restée.
Le rectangle est également une page.
Tout à fait. Dès mes premières créations, j’ai ins-crit sur le tissu un extrait de La Difficulté d’être de Cocteau… Ensuite, j’ai mille fois dessiné sur ce « rectangle ».
Vous n’utilisiez que des textes d’auteurs disparus ?
Non, parfois c’était le fruit d’un dialogue. D’une collaboration. Je pense à un poème génial de mon ami Robert Malaval : Le fantôme est-il de droite ou de gauche ? Le fantôme s’en fout, il est de l’au-delà. Je l’ai imprimé sur une robe qu’a portée Edmonde Charles-Roux… à l’Élysée. Le président Mitterrand lui avait lancé : « Il va falloir que le fan-tôme choisisse son camp ! »
Pour un garçon amoureux des filles, ces robes de jeunesse révélaient peu les formes…
J’étais très intéressé par les filles, mais je voulais créer, tel un enfant, des boîtes à trésors. [Pause.] Et puis ces vêtements rejoignent aussi une tradition de coupe à plat. Je suis né au Maroc, j’ai adoré les djellabas, ensuite les kimonos. La coupe à plat a été ma première urgence de simplicité. Je n’ai pas fait d’école de mode. Et j’aimais l’idée que mes ha-bits soient masculins et féminins.
Les icônes de la pop culture, que vous avez en-suite convoquées, de Tintin au marsupilami, sans oublier les Looney Tunes, sont aussi uni-sexes. Portables par tout le monde.
Au-delà du genre, c’était la recherche d’une forme de symbolique universelle appliquée au monde contemporain. Je suis féru d’héraldisme, l’étude des blasons, pour leur message si simple.
Vous avez payé des droits, pour utiliser ces icônes pop ?
Non ! Ils ont tous voulu me faire des procès, et à la fin ils ont tous été ravis. Ça a lancé un truc, de mettre des cartoons sur nos vêtements. Et ça leur a fait gagner beaucoup d’argent.
Vous dites que durant des années, la couleur était associée au peuple…
Bien sûr, c’étaient les habits des travailleurs qui étaient colorés. Je ne parle pas du Moyen Âge où la couleur sublimait les grands pavois. Mais dans notre société depuis le XIXe, l’élégance bourgeoise, c’était le gris, le beige, le bordeaux, le kaki, le blanc cassé – pas les couleurs primaires.
J’imagine que ça varie… mais aujourd’hui, à quoi associez-vous vos couleurs de travail ?
Alors le bleu, ce serait l’au-delà. L’infini. L’invisible aussi. Le jaune, c’est ma favorite en ce moment. J’aime son acidité, sa chaleur qui me fait penser à ma toute petite enfance à Casablanca. Le vert… la Jaguar de mon père. Le rouge, je pense à cette toile de Sargent, le portrait d’un médecin dans une robe de chambre écarlate… L’orange, toute ma vie, ça restera le Sri Lanka. Un voyage en train, et derrière les vitres, des bonzes lavant leur drap…
Vous « apprivoisez » parfois de nouvelles couleurs ?
Ma révolution actuelle, c’est le rose. Parce que j’ai une fille de six ans, que c’est la couleur de la peau des bébés, et qu’il y a quelque chose de si intime, dans cette teinte. C’est aussi une évocation de Marie-Antoinette. L’innocence du rose, au cœur du tumulte, me bouleverse.
Le blanc et le noir sont-ils des couleurs ?
À mes yeux, des couleurs essentielles. C’est l’équi-libre avec toutes les autres.
Malgré votre mode avant-gardiste, ce que le public retient de vous c’est souvent ce rapport à la couleur… et donc, votre dessin. On vous compare à Cocteau : l’aimez-vous ?
J’ai appris à l’aimer. Sa dimension plurielle. La Belle et la Bête, j’adore. En fait, je préfère ses films… Son univers de dessin, je dirais que c’est la partie que j’aime le moins.
Peut-être parce que c’est votre « frère » ?
Peut-être. Je préfère mes contraires.
Nombre de vos héros étaient gays : Cocteau, Genet, Warhol, Keith Haring, Mapplethorpe. Jeune homme vous étiez assez androgyne, mais votre désir pour les filles a toujours été clair.
Oui, très tôt. Parce que j’avais été longtemps tenu à leur écart, en pension. Mon objectif était de sortir de là pour rencontrer des femmes – que je considérais comme de merveilleux personnages d’inspiration. Et j’ai eu la chance de rencontrer des femmes inouïes dans ma vie, d’Andrée Putman à Farrah Fawcett, d’Adjani à Lauren Bacall, en pas-sant par Vivienne Westwood, ou Duras ; jusqu’à ma compagne et collaboratrice aujourd’hui, Pauline. Donc les femmes ont été au cœur de ma vie. Mais c’est vrai que mon look, jeune, était in-classable. À la fois aristo, punk, décalé, andro-gyne, cheveux longs, hétéro… J’ai longtemps été un ovni.
Ajoutons à cette liste : catholique ! Ce qui me permet d’en venir à votre lien créatif avec l’Église, au dessin de vêtements liturgiques. Ceux créés pour la réouverture de Notre-Dame ont reçu un écho planétaire. J’aime beaucoup votre Croix Rayonnante, ce « logo sacré »…
Ce sont de petits éclats de couleurs collés autour d’une croix découpée en papier doré. Je voulais que ce soit très accessible… et avec de l’imperfec-tion. La vibration de la vie.
Quand Jean-Paul II découvre vos créations pour les JMJ en 1997, il vous dit : « Vous avez utilisé la couleur comme ciment de la foi. » Une phrase incroyable.
Ça lui est venu comme une fulgurance. Il se tient face à moi, face à l’annonciature… et il me lance ça. Je suis parti de cette phrase pour mon travail sur Notre-Dame, vingt-cinq ans après.
Vous avez été élevé par les Frères. Êtes-vous pratiquant ?
Je suis… pratiquement pratiquant ! [Rires.] J’ai une relation très intuitive à la foi.
Au fil de votre route, vous avez dessiné sur tout : les habits du pape, du mobilier, des objets du quotidien, des statues… On a l’impression d’un homme qui veut à tout prix laisser sa trace.
Un peu. Ce désir a longtemps été inconscient. J’ai finalement un côté Petit Poucet. J’ai semé plein de petits cailloux de couleurs dans la forêt. Et j’ai le sentiment, ou l’espoir, qu’après ma mort, ces cail-loux deviendront des graines, qui pousseront…
Quelle chose dessineriez-vous pour incarner toutes les influences de votre vie d’artiste ?
Un fleuve. J’ai toujours été fasciné par les af-fluents. Si vous fixez le dessin d’un fleuve, vous voyez soudain des veines. Et tout au bout, la mer. Ma vie d’artiste, ce n’est pas seulement un axe cen-tral, mais les influences fusionnées de la mode, de la décoration, du dessin, du design, de mes ami-tiés… Au XIXe siècle, est apparue en Allemagne l’idée d’art total. Une circulation sensorielle, sym-bolique, esthétique, entre de multiples disci-plines… Je me retrouve dans cette définition.
Vous avez tout transformé : des montres Swatch aux briques Lego, des canapés Ligne Roset aux chaussures Weston, ou à la porce-laine de Limoges : votre exposition rétrospec-tive présente un grand nombre de ces objets. Mais si vous deviez n’en garder qu’un ?
Hum… Je dirais une veste, créée en 1972, com-posée de plumes multicolores capitonnées sous du plastique translucide. Dès mes débuts, je tiens à montrer « le squelette » du vêtement. Ce que les autres cachent. Ou alors mes robes-fantômes, avec de grands visages peints à la main.
Vos créations ont fait le tour du monde. Que vous évoque… la Suisse ?
C’est drôle, j’en reviens ! J’y installais mon exposi-tion pour enfants créée à Beaubourg, « Le Peuple de demain », qui arrive à Lugano. J’aime beau-coup la Suisse. Son rapport au design. Ses can-tons. Ses paysages cristallisés dans le temps. Et j’ai des liens forts désormais à ce pays, notamment aux Alpes valaisannes – par la collection d’art de ma belle-fille, Garance Primat, qui va être exposée à la Fondation Opale créée par sa sœur Bérengère. Le premier centre d’art contemporain en Europe dé-dié au rayonnement de l’art aborigène australien – qui me passionne.
Vous avez créé de nombreuses sculptures monumentales. Je pense notamment au totem « Giga la vie » à Nanterre : que vous évoque le Jet d’eau de Genève ?
La renaissance perpétuelle. C’est à la fois une sculpture, et une source qui part vers le ciel. Ce qui est rare ! J’aime enfin l’idée de verticalité : c’est ce qui me plaît dans les totems. Ou les ifs…
Une dernière question me vient, du fait de votre passion pour l’héraldique. Vous devez adorer le drapeau suisse, non ? Il aurait presque pu être l’une de vos créations !
Il est superbe. Le rouge. Le blanc. Ce symbole. Mais moi, j’aurais un peu pivoté la croix – à l’image de ce « X » qui est devenu la marque des collaborations entre artistes, entre maisons. Et je l’aurais faite, soit avec deux morceaux de scotch blanc, soit en papier découpé ! Il y a une préca-rité dans le détournement de la matière qui me procure beaucoup de bonheur… Tenez ! On va essayer.


















