Le noir étrusque

C'est la plus importante collection privée de céramique noire villanovienne et étrusque, tant par le nombre (plus de 600 pièces !) que par la variété et la qualité. Connue sous le nom de «C.A.», elle est mentionnée dans des catalogues d’exposition, des articles scientifiques et une monographie que l’on doit à une autorité en la matière. On appelle «villanovienne» laculture du premier âge du feren Italie (900-720 avant J.-C-),d’après la découverte en 1853d’une vaste nécropole située près de Villanova, à 8 km de Bologne. Cette culture est caractérisée par une céramique dite impasto. Ce mot italien, signifiant «pétrissage», suggère le travail de la pâte à pleine main, selon le système des colombins. L’argile employée était très riche en fer, ce qui facilitait l’obtention de la couleur noire, celle-ci provenant d’une cuisson réductrice entre 750° et 900°. Pour rendre la surface des vases lisse et imperméable, les potiers pratiquaient un long et minutieux polissage, à l’aide d’instruments en pierre, en os ou en métal. Quant à la décoration (méandres, métopes, figures animales ou humaines), elle mettait en œuvre toutes sortes de techniques, entaille au couteau, perforation, application de cordelette ou de matrice, passage d’une roulette.Cette poterie d’impasto semble encore régie par l’économie domestique, bien qu’on ne puisse exclure une production qu’on pourrait dire en série, au moins pour certains types de vases. Vers 750 avant J.-C., la céramique villanovienne se modifie progressivement, sous l’influence des colons grecs de Pithécuses (Ischia) et de Cumes, responsables de l’introduction du tour rapide et des...

C’est la plus importante collection privée de céramique noire villanovienne et étrusque, tant par le nombre (plus de 600 pièces !) que par la variété et la qualité. Connue sous le nom de «C.A.», elle est mentionnée dans des catalogues d’exposition, des articles scientifiques et une monographie que l’on doit à une autorité en la matière.

On appelle «villanovienne» laculture du premier âge du feren Italie (900-720 avant J.-C-),d’après la découverte en 1853d’une vaste nécropole située près de Villanova, à 8 km de Bologne. Cette culture est caractérisée par une céramique dite impasto. Ce mot italien, signifiant «pétrissage», suggère le travail de la pâte à pleine main, selon le système des colombins. L’argile employée était très riche en fer, ce qui facilitait l’obtention de la couleur noire, celle-ci provenant d’une cuisson réductrice entre 750° et 900°. Pour rendre la surface des vases lisse et imperméable, les potiers pratiquaient un long et minutieux polissage, à l’aide d’instruments en pierre, en os ou en métal. Quant à la décoration (méandres, métopes, figures animales ou humaines), elle mettait en œuvre toutes sortes de techniques, entaille au couteau, perforation, application de cordelette ou de matrice, passage d’une roulette.Cette poterie d’impasto semble encore régie par l’économie domestique, bien qu’on ne puisse exclure une production qu’on pourrait dire en série, au moins pour certains types de vases.

Vers 750 avant J.-C., la céramique villanovienne se modifie progressivement, sous l’influence des colons grecs de Pithécuses (Ischia) et de Cumes, responsables de l’introduction du tour rapide et des procédés de cuisson oxydoréducteurs. À l’impasto succède le bucchero. Par ce terme emprunté au portugais ou à l’espagnol, les archéologues désignent cette nouvelle céramique, correspondant à l’avènement des Étrusques proprement dits. Elle se distingue de l’impasto par sa légèreté et surtout par la beauté du noir, brillant et satiné, obtenu par application avant cuisson d’un léger badigeon d’oxyde de fer purifié.Outre la qualité technique, le bucchero étrusque se distingue par une grande diversité de formes, les potiers cherchant à rivaliser avec la production contemporaine de récipients en bronze. Et de fait, ils accompliront des prouesses, le bucchero dit «sottile», acquérant une finesse étonnante, préfigurant la porcelaine.Le bucchero, que H.B. Walters (en 1905) a qualifié justement de «céramique nationale de l’Étrurie», disparaîtra vers 500 avant J.-C., détrôné par les importations en provenance d’Athènes (vases à figures noires, puis rouges).

Pour en revenir à la collection privée présentée ici, il faut savoir qu’il a fallu près de 50 ans pour la constituer, au prix de recherches incessantes. C’est l’œuvre d’une femme passionnée d’archéologie. Issue d’une famille de collectionneurs, elle a appris les rudiments auprès de son père, professeur aux Beaux-Arts et particulièrement intéressé par les techniques des Anciens. Après un diplôme de «maître d’art» en céramique, elle s’est spécialisée dans la restauration des antiquités. Enfin, les connaissances pratiques qu’elle a accumulées, lesquelles font généralement défaut aux archéologues, lui ont beaucoup facilité la tâche, quand il s’agissait de repérer les pièces exceptionnelles et de déceler les faux.Devant une telle collection, quelques questions s’imposent:D’où proviennent les objets qui vous entourent ?J’achète chez les marchands, des marchands agréés uniquement. Mais jamais en Italie, où la loi est très restrictive. Je vis en Suisse, mon pays d’adoption, et c’est donc à sa législation que je me conforme scrupuleusement. En bref, je m’approvisionne sur le marché international, le marché «officiel», comme l’on dit.Qu’est ce qui motive vos achats ? Est-ce le désir d’exhaustivité ?Au début, je voulais percer tous les secrets techniques de la céramique noire villanovienne et étrusque. Ensuite, je me suis attachée à l’esthétique. En aucun cas, je n’ai recherché l’exhaustivité, car une collection n’est jamais terminée. Heureusement ! Il se trouve toujours un objet qui ressort de je ne sais où. Je ne fréquente pas les ventes aux enchères, car il me faut un rapport direct avec l’objet. L’idée de disputer une pièce à un autre collectionneur, pour des motifs d’ordre pécuniaire, m’enlève tout désir de posséder la pièce en question. S’il m’arrive tout de même d’acheter aux enchères, je mandate un marchand pour agir à ma place.Pratiquez-vous des échanges ?Oui, et je tiens des objets en réserve dans cette perspective. Soit des objets qui n’ont pas leur place dans ma collection, soit des objets que je n’aime plus assez, qui me lassent.Avez-vous été victime de faussaires ?Non, car je baigne trop dans l’art étrusque et je sens bien les contrefaçons. Le plus grand danger provient du maquillage, qui affecte souvent les pièces historiques. Par exemple, un vase du VIe siècle avant J.-C., parfaitement authentique, se voit doté d’un dessin gravé emprunté à une autre pièce, cet ajout étant parfois antérieur de plus d’un siècle, au mépris du style et de la vraisemblance. Les faussaires, et a fortiori les amateurs qu’ils veulent tromper, n’ont pas les connaissances suffisantes pour éviter ce genre de piège.Quel conseil donneriez-vous à un jeune qui désire commencer une collection ?Aimer ! Les collections constituées pour d’autres motifs que la passion – placement financier par exemple – sont vouées à l’échec. Peu importe sile débutant commet des erreurs…, l’expérience viendra avec le temps. Et j’ajouterais qu’une vraie collection a sa vie propre. Ce n’est pas moi qui possède les objets, mais les objets qui me possèdent. Pour comprendre, il suffit de se reporter au vase que je tiens dans les mains. Les mots qui y sont gravés, en langue étrusque, disent: Moi, l’objet, j’ai été fait pour tel dieu, par tel artisan. L’objet a donc une personnalité individuelle. Il me parle et cela me trouble.


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