ART BYZANTIN PORTRAIT IMPÉRIAL EN MINIATURE

Médaillon en émail cloisonné sur fond d’or, diamètre 3,12cm, XIe ou XIIe siècle, collection particulière
La crise de l’iconoclasme (interdiction du culte des images), qui divisa profondément la société byzantine entre 726 et 843, fut suivie d’une véritable renaissance. C’est à cette époque que feurit l’art de l’émail, sous la forme de médaillons représentant les douze Apôtres et quelques autres saints de l’Église d’Orient, dont Procope, martyrisé à Césarée en 303 sous Dioclétien. Les émailleurs impériaux, la plupart établis dans la capitale, avaient pour clients la cour, les institutions ecclésiastiques et des particuliers fortunés. Une collection privée contient six de ces médaillons précieux, d’une grande rareté. Le principal de ces médaillons, exécuté comme les autres selon la technique du cloisonné sur fond d’or, représente Hélène, l’impératrice. Son identité est révélée par l’inscrip- tion (HELENÈ), en grosses lettres de couleur rouge. En vertu de son titre d’Augusta, Hélène porte les attributs impériaux : en premier lieu la couronne d’or, ornée de perles et de pierres précieuses, en second l’écharpe (loros), sur laquelle sont cousues d’autres pierreries. Tout en faisant le geste de la parole, paume ouverte vers l’auditeur, Hélène tient dans son poing droit la croix du Christ. Ce type de croix, propre aux chrétiens orientaux, comprend une double traverse, celle du haut étant la forme amplifée de l’écriteau (titulus) qui, dans la croix latine, porte l’inscription INRI. Cette représentation, de par sa forme circulaire, n’est pas sans rappeler les monnaies byzantines, en particulier celles qui sont postérieures à 650 : le buste impérial de profl s’y trouve remplacé par la vue frontale. Quant aux trous...

La crise de l’iconoclasme (interdiction du culte des images), qui divisa profondément la société byzantine entre 726 et 843, fut suivie d’une véritable renaissance. C’est à cette époque que feurit l’art de l’émail, sous la forme de médaillons représentant les douze Apôtres et quelques autres saints de l’Église d’Orient, dont Procope, martyrisé à Césarée en 303 sous Dioclétien. Les émailleurs impériaux, la plupart établis dans la capitale, avaient pour clients la cour, les institutions ecclésiastiques et des particuliers fortunés. Une collection privée contient six de ces médaillons précieux, d’une grande rareté.

Le principal de ces médaillons, exécuté comme les autres selon la technique du cloisonné sur fond d’or, représente Hélène, l’impératrice. Son identité est révélée par l’inscrip- tion (HELENÈ), en grosses lettres de couleur rouge. En vertu de son titre d’Augusta, Hélène porte les attributs impériaux : en premier lieu la couronne d’or, ornée de perles et de pierres précieuses, en second l’écharpe (loros), sur laquelle sont cousues d’autres pierreries. Tout en faisant le geste de la parole, paume ouverte vers l’auditeur, Hélène tient dans son poing droit la croix du Christ. Ce type de croix, propre aux chrétiens orientaux, comprend une double traverse, celle du haut étant la forme amplifée de l’écriteau (titulus) qui, dans la croix latine, porte l’inscription INRI. Cette représentation, de par sa forme circulaire, n’est pas sans rappeler les monnaies byzantines, en particulier celles qui sont postérieures à 650 : le buste impérial de profl s’y trouve remplacé par la vue frontale. Quant aux trous percés au pourtour des médaillons, ils servaient à les clouer sur un support en bois, icône ou retable.

Née vers 255, à Depranum, bourgade de Bithynie, en bordure de la mer de Marmara, Hélène fut remarquée par Constance Chlore, qui débutait alors dans la carrière militaire. Il en ft sa concubine en titre. Hélène était de basse extraction, si l’on en croit Ambroise de Milan. Constance l’aurait rencontrée en un lieu mal famé, une taverne (sta- bulum), dont elle était tenancière, voire simple servante. Et Ambroise s’émerveillait de cette promotion sociale fulgurante, qui la ft passer sans transition « de la fange à l’Empire ! ». En 289, quand il fut appe- lé à régner auprès de Maximien, Constance se vit contraint, pour res- pecter les convenances, de se séparer d’Hélène. Cette répudiation fut pour celle-ci un véritable drame, car elle se trouva de fait privée de Constantin, le fls qu’elle avait eu de Constance et qu’elle chérissait. Hélène mena donc une vie efacée, en marge du pouvoir. Mais quand Constance mourut, en juillet 306, alors qu’elle se trouvait à Trêves, Constantin, devenu César entre-temps, la reprit près de lui. Et dès ce moment, il l’entoura de son afection et la combla d’honneur, al- lant jusqu’à falsifer son origine en la déclarant flle de roi (dans ce cas Claude le Gothique, un barbare, mais un roi tout de même !).

Tête (portrait) en bronze, hauteur 35cm, milieu du IVe siècle, collection particulière 1

Tous les historiens, antiques et modernes, s’accordent à voir en Hélène une personnalité hors du commun, qui exerça sur son fls une grande infuence, dont on peut supposer qu’elle s’étendait à la question religieuse. En efet, Hélène était chrétienne. Si bien que le haut fait de son existence fut en rapport avec sa foi : un pèlerinage en Palestine, qu’elle accomplit dans son grand âge, à une date incer- taine. À Bethléem, elle éleva la basilique de la Nativité et à Jérusalem, celle de l’Ascension, sur le mont des Oliviers. À Jérusalem encore, selon la légende, elle ft procéder à des fouilles pour découvrir les instruments de la Passion, dont celle de la Vraie Croix, qui seront à l’origine du culte des reliques. Hélène mourut à Nicomédie, ca- pitale de la Bithynie, en 327. Son corps fut déposé dans un sarco- phage en porphyre, destiné originellement à son époux Constance. Cette vénérable antiquité peut se voir au Museo Pio – Clementino du Vatican.

Hélène est particulièrement vénérée par les orthodoxes, qui la rangent parmi les saints. Et de fait, pour en revenir au médaillon, on constate que le nom d’Hélène s’y trouve précédé par les trois premières lettres de l’adjectif hagia («sainte»). Cette sanctifcation est d’ailleurs confrmée par la présence de l’auréole, dont l’impératrice est pourvue. Le portrait du médaillon est bien entendu sommaire, stéréotypé et l’on en vient tout naturellement à se demander quelle était la véritable physionomie d’Hélène. Cette question ofre l’occasion de présenter ici une oeuvre remarquable, une sculpture, quasiment inédite. C’est une tête en bronze, probablement détachée d’une statue en pied plutôt que d’un buste. Le style est caractéristique de l’époque constantinienne : rudesse des contours autant que du modelé, réalisme appuyé et puissance expressive. Le modèle, une femme d’âge avancé, en impose par son regard pénétrant, intelligent et impérieux. D’où l’hypothèse qu’il s’agisse d’Hélène. Ce portrait serait une réplique de l’efgie ofcielle, réalisée du vivant de l’impératrice ou peu après sa mort.

Enfn, à propos des émaux byzantins, il faut ajouter qu’on les connait en Occident depuis longtemps. En efet, ils sont entrés dans les trésors des églises à la suite du pillage de Constantinople, commis par les Croisés en 1204. C’est le cas des plaques émaillées qui ornent la Pala d’Oro, un devant d’autel (antependium) constituant l’attraction majeure de la basilique Saint-Marc à Venise. On peut citer aussi les plaques non moins prestigieuses qui composent la couronne de Constantin IX Monomache (mort en 1055), conservée à Budapest. L’empereur se présente sur la plaque centrale, sa femme Zoé et sa soeur Téodora occupant les latérales.

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