… À l’heure du sensationnalisme et du spectaculaire, l’Espace Muraille à Genève présente l’œuvre d’un peintre attaché à la représentation « de cela simplement qui est ».
« Je suis plein de toiles dans la tête. J’ai écrit tout ça en liste sur une feuille de papier et je trace au fur et à mesure. Une mesure lente d’ailleurs. Mais je suis heureux» ,écrit Thierry Vernet à son ami de toujours Nicolas Bouvier, dans une lettre du 20 octobre 1955. Le peintre avait quitté l’écrivain voyageur quelques mois auparavant, après avoir baroudé ensemble jusqu’en Orient à bord d’une Fiat 500. Rencontré pendant ses années de collège, Bouvier partageait son rêve d’un grand
Visible à l’Espace Muraille jusqu’au 21 novembre 2020
départ, l’appel du lointain, la tentation de l’exotisme. Lui, continuait désormais seul l’aventure ; Vernet, marié à Floristella Stephani, rentrait, prêt à pleinement vivre sa vocation d’artiste, à prendre en main son destin de peintre. Un destin qu’il voulait parisien.
Né au Grand-Saconnex en 1927, le jeune Thierry Vernet, qui avait refusé de s’inscrire à l’École des Beaux-Arts de Genève, fier de son statut d’autodidacte, n’avait pas froid aux yeux. C’était rien de moins que Paris qu’il visait. Vernet n’avait pas peur de se mesurer à ses pairs, lui qui, à dix-huit ans à peine s’était déjà mesuré à la tradition. Pour sa première commande, une vaste composition murale figurant la dernière Cène à la chapelle des Cornillons à Chambésy, au bord du lac Léman, il s’était essayé à la technique de la fresque et osait déjà relire l’iconographie sacrée conventionnelle en campant son Christ le verre de vin à la main. Lors de son premier séjour à Paris en 1949, Vernet fréquente plusieurs ateliers libres, visite des expositions, pousse la porte de nombreuses galeries et multiplie les rencontres. En 1958, il décide de s’y installer définitivement. Son choix révèle ses ambitions : être là où se fait la modernité…