L’Olympe d’Ini Archibong

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Révélé en 2016 avec ses magies de verre, le designer américano-nigérian sis en Suisse poursuit son onirique trajectoire de designer artiste avec la collection Beyond Heaven conçue pour Sé. Texte: Viviane Scaramigli Photos: Sé, Amen & Amen, Othr, Piotr Niepsuj Formentera, lampesen verre soufflé, 2017© Formentera Cela ressemble à des sculptures de Lucio Fontana avec leur arrondi, à la fois simple, puissant et hautement sensuel. Peu à voir pourtant avec le designer américano-nigérian si ce n'est cette traversée du miroir offerte aux énergies invisibles animées par les mouvements de l'espace et du temps. Elles s'appellent Circé, Helios, Eos et comme l'ensemble des pièces conçues pour l'éditeur anglais Sé, elles retournent à l'Olympe et s'inspirent du seuil entre terre et ciel pour se faire éléments de sérénité. Une sorte d'autre monde où nos habitudes perceptives opèrent avec des règles qui vous déconnectent de l'illusoire fadeur du quotidien. Ini Archibong est ainsi, c'est plus fort que lui. Rivé à la culture du merveilleux depuis l'enfance, toujours en mode évasion à travers la littérature héroïque, fantastique, religieuses ou philosophique. Toujours, depuis qu'il crée, à y explorer les vibrations de son moi intérieur pour les distiller dans un langage inspiré par le sens mystérieux de l'existence. Jardin secret Né il y a 34 ans en Californie de parents immigrés nigérians, il a été élevé dans la religion chrétienne et une culture débordante de rythmes et de couleurs au plus au plus proche des traditions originelles. A cet héritage qu'il traduit...

Révélé en 2016 avec ses magies de verre, le designer américano-nigérian sis en Suisse poursuit son onirique trajectoire de designer artiste avec la collection Beyond Heaven conçue pour Sé.

Texte: Viviane Scaramigli
Photos: Sé, Amen & Amen, Othr, Piotr Niepsuj

Formentera, lampes
en verre soufflé, 2017
© Formentera

Cela ressemble à des sculptures de Lucio Fontana avec leur arrondi, à la fois simple, puissant et hautement sensuel. Peu à voir pourtant avec le designer américano-nigérian si ce n’est cette traversée du miroir offerte aux énergies invisibles animées par les mouvements de l’espace et du temps. Elles s’appellent Circé, Helios, Eos et comme l’ensemble des pièces conçues pour l’éditeur anglais Sé, elles retournent à l’Olympe et s’inspirent du seuil entre terre et ciel pour se faire éléments de sérénité. Une sorte d’autre monde où nos habitudes perceptives opèrent avec des règles qui vous déconnectent de l’illusoire fadeur du quotidien. Ini Archibong est ainsi, c’est plus fort que lui. Rivé à la culture du merveilleux depuis l’enfance, toujours en mode évasion à travers la littérature héroïque, fantastique, religieuses ou philosophique. Toujours, depuis qu’il crée, à y explorer les vibrations de son moi intérieur pour les distiller dans un langage inspiré par le sens mystérieux de l’existence.

Jardin secret

Né il y a 34 ans en Californie de parents immigrés nigérians, il a été élevé dans la religion chrétienne et une culture débordante de rythmes et de couleurs au plus au plus proche des traditions originelles. A cet héritage qu’il traduit dans des nuances chromatiques captivantes, s’ajoute les influences du hip hop américain, une vraie passion pour la musique, les arts  et les mathématiques, et bientôt l’Europe, Singapour, d’autres visions du monde. « J’ai vraiment l’impression que voyager et interagir avec d’autres cultures, y compris la mienne, est la clé de qui je suis en tant que designer ». Engagé d’abord dans des études universitaires commerciales, il préfère se pencher sur les livres de la bibliothèque de la Société théosophique locale, réalise vite qu’il ne s’accomplira qu’en donnant libre cours à sa propre expression. « La transition a été radicale, mais je savais que je devais rejoindre mon destin, donner un vrai sens à ma vie ». Il  va se frayer un chemin en architecture avant de s’orienter vers le design. Diplômé de l’Art  Center College of Design de Pasadena, c’est à la prestigieuse Ecole cantonale d’art de Lausanne qu’il développe une approche plus luxueuse et artisanale qui le conduisent à des postes de consultant pour des maisons telles La Montre Hermès, De Sede ou Chrysler, puis à des créations remarquées à l’image de ses lampes en verre soufflé pour Formentera ou son hommage en porcelaine à Carlo Scarpa pour Othr. Mais c’est avec la collection In the Secret Garden présenté par le label américain Amen & Amen au Salon du meuble de Milan en 2016 qu’il se voit propulsé sur la scène des créateurs les plus prometteurs. « Révéler la grandeur de l’artisanat et ne jamais se satisfaire des choses telles qu’elles sont », les objectifs de la société fondée par Nana Boateng et l’acteur et artiste Terry Cruise ne pouvaient qu’éclairer l’éthique et l’ethos du concepteur. Il y a là le fin disque de marbre de Carrare reposant sur des pieds éthérés en verre coloré, référence aux antiques histoires de personnages marchant sur l’eau. Les chroniques de Narnia façonnent le sculptural luminaire Jadis: tombée d’un disque de marbre géant, sa cascade de bourgeons cristallins est réalisée par le célèbre souffleur de verre suisse, Matteo Gonet. Quant au canapé Cheshire tapissé d’un imprimé traditionnel de l’Afrique de l’Ouest,  il façonne dans le daim et les accents de laiton le large sourire du chat d’Alice au pays des merveilles. Une série arrimée au fait main qui inculque la dimension artistique  à l’objet utilitaire. Une constante dans le travail d’Archibong, l’autre étant cette fusion formelle entre force et fragilité, « comme une tentative, dit-il, d’apporter un peu de la substance d’un rêve vivant dans un environnement vivant ».

Tables Orion et Galilée
Collection Secret Garden,
Amen & Amen, 2016
© Amen & Amen

Clarté zen

Révélées en avril dernier par la galerie de Rossana Orlandi lors de la Milan Design Week, les onze premières des vingt-deux pièces de la collection Beyond Heaven marquent l’exigeante trajectoire de Sé. Fine à humer le talent de créateurs singuliers tels Nika Zupanc Jaime Hayon ou Damien Langlois-Meurinne, elle a, en dix ans d’existence, développé son identité sur l’exploration de matières nobles et de techniques de production qui les sublime, le tout au nom d’une poétique à la fois inattendue et intemporelle. Entre fantasme et matérialité, Ini Archibong s’y reconnaît dans le partage d’une même clarté zen.  Dans cette remontée à l’Olympe : un fauteuil à la fois joufflu et délicat, des tables et lampes inspirées par le soleil, un luminaire évoquant un nuage, l’absolue nudité du banc de marbre Atlas… « Tout ce que je conçois est un processus spirituel », dit-il tout en refusant de s’identifier à une croyance spécifique. Quant à la musique, elle reste ancrée dans sa vie. Chaque création débute par un rythme qui capture ses inspirations. Chaque projet a au moins pour base de concentration un EP (extended play) de chanson. Tel pour Sé un morceau de Blu: « …Build you heaven full of blessed thoughts that’re real ». Construit ton paradis avec des pensées bénies qui sont réelles.

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